Devant la Cour internationale de justice : Washington continue de défendre Israël

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Washington, ainsi que la France, ont plaidé au troisième jour des audiences devant la CIJ, qui doit remettre un avis juridique sur la légalité de l’occupation israélienne. Les États-Unis ont été catégoriques : Israël ne devrait pas être légalement enjoint de se retirer des territoires palestiniens occupés sans garanties de sécurité.

Troisième jour d’audiences devant la Cour internationale de justice (CIJ). Depuis lundi 19 février, un nombre inédit de 52 pays sont appelés à témoigner. L’Assemblée générale des Nations unies avait demandé en décembre 2022 l’avis de la haute instance juridique sur la légalité de l’occupation israélienne. Ce mercredi, dix Etats ont plaidé, dont la France et les États-Unis.

Et une fois de plus, Washington se tient aux côtés de son allié israélien, malgré les pressions internationales et le mécontentement de la gauche du parti démocrate sur la poursuite de la guerre à Gaza. À La Haye, le juriste du département d’État américain, Richard Visek, s’est livré à une défense en règle du contrôle par Israël des territoires palestiniens de Cisjordanie, de Jérusalem-Est et de Gaza. Pour lui, un avis consultatif de la Cour pourrait obérer les efforts de paix s’il ne tient pas compte « des besoins de sécurité d’Israël ».

Concrètement, Washington a demandé aux juges de « préserver et promouvoir » le cadre de négociations établi depuis 1967 dans les résolutions onusiennes, rapporte notre correspondante à La Haye, Stéphanie Maupas. Autrement, de ne rien changer, au risque – selon les États-Unis – de « rendre les négociations à plus difficile ». Ils ont en outre aussi demandé à la Cour de ne pas conclure « qu’Israël est légalement obligé de se retirer immédiatement des territoires palestiniens ».

Les États-Unis seuls dans leur position

La partie palestinienne n’a pas manqué de souligner l’isolement américain sur cette question, alors que d’autres pays participent aux audiences. Ce n’est pas la première fois que les États-Unis se retrouvent seuls avec leur allié. À trois reprises – dont la dernière date de ce mardi –, une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies demandant un cessez-le-feu immédiat à Gaza s’est vue opposer le véto américain.

Parallèlement, l’administration Biden dit travailler à un texte défendant une cessation des hostilités dès que possible, quand la sécurité d’Israël sera assurée. Autrement dit, pas avant que le Hamas soit mis hors d’état de nuire. Devant les pressions internationales et intérieures, notamment venues de la gauche du parti démocrate et des Américains musulmans, la Maison Blanche fait savoir sa frustration vis-à-vis de l’attitude du Premier ministre israélien. Un discours qui ne l’empêche pourtant pas de rester solidaire dans les actes.

« Je n’ai rien entendu de nouveau », a réagi à la prise de position américaine le chef de la diplomatie palestinienne, Riad Al-Maliki. Washington a insisté pour que le conflit israélo-palestinien soit abordé « dans d’autres forums et pas ici », a-t-il déclaré. « Nous avons essayé d’autres forums au cours des 75 dernières années et nous avons affronté le veto américain et l’hégémonie américaine sur les processus de prise de décision au sein du système des Nations unies, a-t-il poursuivi. Et c’est pourquoi nous sommes venus devant la CIJ. »

« La France ne reconnaitra jamais l’annexion illégale de territoire palestinien »

Avant la délégation américaine, la Colombie, Cuba, les Émirats arabes unis et l’Égypte ont estimé illégale l’occupation israélienne. Cuba a fustigé l’usage du droit de véto par les Américains pour couvrir des situations illégales. Les Émirats ont insisté sur la nécessité de préserver la dimension spirituelle et religieuse de Jérusalem. La Hongrie, entendue en fin d’après-midi, a largement suivi la plaidoirie américaine.

De son côté, la France, rare pays européen à s’être présenté à la Cour, a rappelé ses positions sur la guerre à Gaza. Ses avocats ont ajouté qu’Israël doit cesser de violer le droit du peuple palestinien à l’autodétermination et réparer les dommages causés aux Palestiniens.

Car pour le directeur des affaires juridiques du Quai d’Orsay, Diego Colas, cela implique des conséquences. « Il en résulte pour tous les États une obligation de non-reconnaissance de toute situation créée en violation grave du droit international. Toute forme d’annexion, y compris partielle, ne saurait ainsi être reconnue au regard du droit international. À cet égard, dans les territoires palestiniens occupés, comme partout ailleurs, la France ne reconnaitra jamais l’annexion illégale de territoire », a-t-il déclaré.

Il a également réitéré le « soutien constant » de la France « à une solution négociée à deux États » et a appelé à une relance « décisive et crédible » du processus de paix. Les audiences devant la CIJ se poursuivent jusqu’au 26 février, et la décision des juges devrait être rendue dans les six mois.