États-Unis : La quatrième inculpation de Trump rapproche son calendrier judiciaire des élections

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Une semaine après l’inculpation de l’ex-président Donald Trump, lundi 14 août, par un grand jury de Géorgie pour tentative présumée d’inversion des résultats de la présidentielle de 2020 dans cet État, le principal candidat républicain à la Maison Blanche annonce une conférence de presse lundi 21 août. Il multiplie les déclarations, accusant la justice d’une cabale, car la plupart des procès pourraient s’ouvrir en pleine campagne pour les primaires.

L’ex-président Donald Trump répète que l’affaire sur une implication pour inverser les résultats en Géorgie est montée de toutes pièces : c’est la ligne de défense de l’ancien président dans toutes ses inculpations jusqu’ici. Il promet une grande conférence de presse la semaine prochaine pour présenter, dit-il, un rapport préparé par son équipe afin de contrer les accusations qui pèsent contre lui, rapporte notre correspondante à New York, Loubna Anaki.

Comme à chaque inculpation, les élus du Parti républicain ont eux aussi dénoncé ces poursuites comme étant une « chasse aux sorcières » politique. Et plus Donald Trump est poursuivi, plus les affaires s’accumulent, plus sa cote de popularité auprès de ses partisans se renforce, paradoxalement. Ils nous l’expliquent de façon très claire : pour eux, ces affaires ne sont rien d’autre qu’une machination politique des Démocrates qui viserait à empêcher Donald Trump de se présenter à nouveau, et donc en fait, ces inculpations, ces affaires, ne font que renforcer, dans la logique antisystème de ces militants, la conviction de que Donald Trump leur répète depuis des années, à savoir qu’il y a une machination contre lui. Cette logique victimaire est crédibilisée par ces affaires. Et puis, effectivement, cette logique fonctionne pour la primaire, il reste à voir si ça fonctionnera pour une élection générale, ça fonctionnera sans doute un peu moins pour une élection générale, précise notre correspondant à Miami, David Thomson.

L’ancien président compte désormais quatre inculpations : en Géorgie, à Washington, en Floride et à New York. Ces affaires sont loin pour le moment de faire du mal à sa campagne pour la présidentielle de 2024. Bien au contraire : à chaque nouvelle inculpation, le républicain noie ses partisans de messages appelant aux dons, et à chaque fois, il se vante de récolter des millions pour sa campagne.

Mais avec ses ennuis judiciaires et les multiples procès à venir, une grande partie de ces fonds sert à régler ses frais juridiques.

Le calendrier juridique se chevauche avec le calendrier électoral

Après cette nouvelle inculpation lundi, Donald Trump a rendez-vous dans une semaine pour le premier débat télévisé des candidats républicains qui se disputeront la course à la Maison Blanche, et sa dernière inculpation y sera sans doute évoquée.

Si la date de ce quatrième procès au pénal n’a pas encore été fixée, tous ces procès viendront s’intercaler dans le calendrier des élections américaines, ce qui peut renforcer l’argument d’une cabale contre la candidature de l’ancien président.

Aussi, la perspective d’une condamnation avant la présidentielle est de plus en plus forte avec cette quatrième inculpation de Donald Trump. Pourquoi ? Tout simplement parce que la procureure Fanny Willis, du comté de Fulton, l’a dit : elle veut un procès rapide, un procès qui se tienne rapidement, dans les six mois, c’est-à-dire que le procès devrait avoir lieu avant le début de la primaire républicaine.

En clair, la condamnation tomberait possiblement au milieu de la primaire républicaine et donc avant le début de la présidentielle, ce qui veut dire que Donald Trump, qui selon toute vraisemblance devrait être le candidat républicain pour cette présidentielle américaine, arriverait devant les électeurs américains avec une condamnation potentiellement à une peine de prison ferme. Il pourrait même faire campagne depuis sa prison, c’est une possibilité puisque les Pères fondateurs n’avaient pas prévu ce cas de figure, et rien n’empêche Donald Trump de faire campagne depuis une prison.

Le 15 janvier 2024 marque le coup d’envoi des primaires : le « caucus » de l’Iowa est le premier rendez-vous dans lequel les citoyens américains décident qui des républicains et des démocrates, ils souhaitent voir s’affronter. Ce jour-là, Donald Trump est convoqué au tribunal dans un procès pour diffamation, mais il a lieu au civil : sa présence physique n’est donc pas requise. En revanche, la loi lui impose de comparaitre en chair et en os au pénal et donc, de se retirer de la campagne le temps du procès. Deux d’entre eux sont déjà inscrits à l’agenda et tombent au beau milieu des primaires.

Pour l’affaire Stormy Danielsoù il est accusé de fraude comptable mise en place pour camoufler l’achat du silence de cette ancienne actrice porno et éviter ainsi un scandale en pleine élection présidentielle de 2016, le rendez-vous est au 25 mars. Soit lors d’un mois où non moins de 30 États choisissent leur candidat. L’affaire des documents classifiés, elle, sera jugée le 20 mai. Soit avant que les huit derniers États ne se décident.

Casse-tête logistique et politique pour les dates des deux autres procès

Reste, pour les juges américains, à fixer les dates des deux derniers procès d’envergure qui pourraient envoyer Donald Trump en prison. Et c’est un casse-tête logistique qu’ils n’avaient jamais rencontré jusqu’à présent : d’un côté, il faut juger le candidat avant qu’il ne puisse profiter de ses potentiels futurs pouvoirs présidentiels ; et de l’autre, laisser le candidat faire campagne pour respecter le processus démocratique américain.

Un des arguments de défense est tout trouvé pour Donald Trump et ses partisans : le calendrier judiciaire viserait volontairement à nuire à son calendrier politique.

Car pour la troisième affaire dans laquelle il a été inculpé cette année, la date du procès sera fixée fin août. Il y est accusé d’avoir voulu saboter le processus électoral de 2020 et la victoire de Joe Biden, et avoir poussé à l’assaut du Capitole en janvier 2021. S’agissant d’un procès fédéral, il pourrait passer avant les trois autres procès qui l’attendent : Jack Smith, l’avocat qui supervise le dossier, a proposé la date du 2 janvier 2024 pour l’ouverture du procès, soit deux semaines avant le premier caucus.

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Les faux grands électeurs, une épine de plus dans le pied de Trump

Deux des affaires mettent en cause Donald Trump pour ses tentatives d’inverser les résultats de la présidentielle de 2020, raconte notre correspondante à New York, Loubna Anaki. Selon les procureurs, Donald Trump et ses alliés auraient mis en place un complot basé notamment sur de faux électeurs.

À Washington comme en Géorgie, les deux inculpations de Donald Trump révèlent un plan bien organisé destiné selon les procureurs à « entraver et faire échouer la certification des résultats de la présidentielle de 2020 remportée par Joe Biden ». Toujours selon les actes de mise en accusation, après avoir échoué à convaincre les hauts responsables de certains États de faire pencher la balance en sa faveur, Donald Trump et ses alliés sont passés à l’action.

Certains se seraient ainsi rendus sur le terrain dans sept États clés : l’Arizona, la Géorgie, le Michigan, le Nouveau-Mexique, le Nevada, le Wisconsin et la Pennsylvanie. Là, ils auraient recruté de faux grands électeurs à qui ils auraient fait signer de faux certificats attestant de la victoire de Donald Trump dans leur État. Car, aux États-Unis, le président est choisi au suffrage universel indirect. Chaque État attribue ses grands électeurs au candidat arrivé en tête localement.

Au final, le plan de Donald Trump a échoué, mais pour les procureurs, c’est sur ce point que résident les accusations d’association de malfaiteurs, de fraudes, de faux et usage de faux ou encore de corruption retenus contre l’ancien président et ses alliés. Des accusations qui risquent de lui valoir des années en prison en cas de condamnation.