Bénin : Hermann Dimitri Adankpo dévoile des astuces des cybercriminels

Economie & Tech

Douze décembre 2018

Le 5 décembre 2018, le fameux notaire a contacté la victime au téléphone pour l’informer que le registre de commerce est prêt. Mais avant, il lui faut rédiger le contrat qu’elle doit se déplacer pour signer.

Le 12 décembre 2018, accompagnée du jeune plombier, elle s’est rendue juste après la frontière Bénin Nigéria, à Igolo, dans un hôtel. Là-bas, l’attendaient effectivement Ambroise Fagnidé, puis le notaire. Le notaire montre le contrat qu’elle a voulu retirer, pour aller s’enquérir du contenu posément à la maison. Ambroise la calma et lui demande d’être relaxe. « Je suis tes yeux et tes oreilles ici ». Convaincue, elle signe après avoir lu sur place. Il reste à retirer l’original du registre de commerce établi. Là encore, le notaire s’y oppose. La raison est toute simple. Le document ne peut définitivement lui revenir que lorsqu’il aura reçu les signatures de toutes les parties, et lorsqu’il sera officiellement enregistré.

Elle réclame alors au moins une copie. Niet. Le plombier va lui ramener ça après, affirme Ambroise. Le fameux Ambroise, le frère de Saturnin, ami du plombier.

Quand vous voyez la photo du boss qui a les yeux rivés sur le téléphone là, sachez que les bonnes choses arrivent. Son nom ? Jimmy.

Que va-t-il se passer à la suite du périple d’Igolo?

La certification du contrat

Après l’étape d’Igolo, le prétendu notaire rappelle la dame, pour lui signifier que les fonctionnaires du ministère des finances du Nigeria, exigent la somme d’un million cinq cent mille naïras comme dessous de table, avant de certifier le contrat. Raison évoquée, lorsque les béninois gagnent les gros marchés comme celui-là, ils ne font jamais le retour, alors, Ils préfèrent couper leur part dès le départ. Comme à son habitude, elle informa le plombier. Mais avant, elle proposa au notaire, de prendre sur lui, la responsabilité de signer un engagement avec les intéressés, qui sera respecté dès le premier virement. « Je vais vous revenir », réagit t-il.

Le lendemain matin, le soi-disant sénateur qui veut se faire construire un édifice entre en jeu. Le farfelu, toutes les fois qu’il appelle, c’est aux environs de trois heures du matin. Il menace presque, en disant que si elle ne fait pas diligence, elle risquerait de perdre le marché. Pire, toutes les dépenses effectuées par le passé, tomberont à l’eau. D’ailleurs, il dit  envisager déjà de confier le marché à un autre entrepreneur. Entre-temps, Ambroise intervient pour essayer de la convaincre à son tour. Ce fut 48 heures de harcèlement continu.  Elle prend son calme, et d’un ton ferme, suggère à Ambroise et au plombier, avec tous ceux qui espèrent des commissions après l’exécution du marché, qu’ils mettent la main à la poche. Elle s’est donc engagée fermement à ne débloquer que la moitié de l’argent, qui équivaut à 600000 CFA. Ayant compris qu’elle commence à s’essouffler, à déceler des anomalies, et qu’elle pourrait raccrocher, ils ont accepté la proposition.

Pour la rassurer, et la ramener à de meilleurs sentiments, Ambroise trouve la formule magique. Négocier avec la femme du sénateur qui est son patron, elle aussi, une milliardaire, et qui financerait même la campagne du mari à Abuja en ce moment là.

Dans la foulée, Ambroise informe que c’est le bout du tunnel dès que cette phase est passée.

Le lendemain matin, le sénateur la joint au téléphone pour l’informer qu’ils sont d’accord, seulement qu’il faut envoyer l’argent par Western Union. Ça veut dire que l’argent ne doit plus transiter par les mains du plombier. Dans le même temps, Ambroise avait déjà exigé que ce soit lui-même qui va se charger d’amener les fonds à Abuja afin de suivre le dossier de prêt.

Que faut-il faire ? Elle décide d’utiliser le même procédé en envoyant le plombier leur remettre l’argent, qui est en réalité le plombier de son père depuis des lustres, et en qui son père a une confiance folle. Elle a désobéi au sénateur, tout en prenant le soin de dire au plombier de lui envoyer une vidéo qui attestera que les autres ont effectivement mobilisé leur part. Cette opération a eu lieu entre le 13 et le 14 décembre 2018. Toujours un peu après Igolo. Après Igolo c’est encore Igolo.  Arrivé là-bas, l’imbécile dit que son portable est défaillant…..

Mésentente entre les membres du réseau

Le plombier ayant trahi à Igolo, en affirmant que la vidéo de son téléphone lui a fait subitement faux bond, empêchant ainsi la dame d’avoir la preuve illusoire, que l’autre parti a effectivement débloqué les cinq cent mille naïras, cet argent, à son tour, s’évapore…..

Le lendemain, le faux sénateur téléphone avec empressement, tout furieux, surexcité. Son problème, c’est au nom de quoi elle a pu envoyer l’argent à Ambroise, alors qu’il lui a demandé de faire un transfert Western Union?

Il s’en est suivi une vive altercation verbale, violente, entre lui et l’éternelle victime, qui, désabusée, raccrocha net. Il faut noter que l’autre supposé grief principal du sénateur, est la supposée connivence née entre ses partenaires et sa supposée femme, ayant abouti au déblocage de cinq cent mille naïras. « Pourquoi associez- vous ma femme à vos affaires? Savez-vous combien elle a dépensé, et continue de dépenser, pour la campagne en vue de ma réélection à Abuja? Je finirai par tout arrêter. Vous n’êtes pas la seule entrepreneure au Bénin. J’en ai marre. Il faut considérer que ma femme n’a rien remis. Je verrai les autres pour qu’ils lui retournent ses sous. Si vous ne trouvez pas les 500 000 naïras restants, toutes vos dépenses antérieures sont perdues, et je m’en fou » vociféra t-il longuement. »

Vingt-quatre heures de silence, et ça reprend de plus belle. Envahie par la peur de tout perdre, elle sollicite courageusement l’aide de son père, un ancien barron de l’église protestante du Bénin, à qui elle avait tout caché jusque-là. Même à cette étape, elle n’est pas rentrée dans le détail, mais parvient à obtenir le chèque de 500 000 naïras. C’est le plombier, l’homme de confiance du père, qui alla chercher l’argent à la banque accompagné de ce dernier. Ensuite, le colis est déposé à la dame qui le transférera sur Lagos sans plus tarder, au nom de :

First name: Abiola

Middle name: Emmanuelle

Last name : Akinwalé

Lagos

Zip code: 23401.

Un détail important, toutes les fois qu’il est question de chèque, le plombier, le fameux plombier, l’homme par qui tout est arrivé, lui, a toujours exigé l’espèce sonnante et trébuchante.

A peine cette opération effectuée, que, Ambroise surgit au téléphone. « Je t’ai dit de ne rien envoyer,  à qui que ce soit si ce n’est moi. C’est moi je vis au Nigeria, c’est moi ton œil et ton frère ici. Si tu te fais escroquer ça ne regarde que toi. C’est moi qui maitrise mon patron et les tracasseries administratives au Nigeria. En tout cas, ce que tu as envoyé ne m’engage pas du tout…. » Patati patata

Demain, Saturnin interviendra, avec un ton doux, en faveur d’Ambroise pour tenter d’obtenir un troisième déblocage de 500 000 naïras.

En attendant gardons en mémoire ce visage, celui de monsieur Buckley, un autre salopard.

Hermann Dimitri Adankpo