Asie Pacifique : En Chine, Emmanuel Macron fait passer des messages sans faire bouger les lignes

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Emmanuel Macron est à Canton ce vendredi 7 avril pour le troisième et dernier jour de visite d’État en Chine. Le président français, qui a appelé jeudi une nouvelle fois la Chine à « ramener la Russie à la raison » vis-à-vis de l’Ukraine, doit s’entretenir à nouveau avec Xi Jinping, son homologue chinois. Premier bilan de ce voyage officiel.

Ce retour d’Emmanuel Macron en Chine, c’est un peu le bol de thé à moitié vide et à moitié plein. À moitié plein, car c’est finalement plus qu’une reprise de contact et plus qu’un « re-paramétrage » de la relation franco-chinoise, comme le disaient les diplomates avant le départ de la délégation. La Chine cherche des alliés face aux États-Unis. Elle veut faire oublier l’ère glaciaire du « zéro Covid » pendant laquelle le pays s’est retrouvé complètement isolé.

Donc, ça c’est vu, ça c’est entendu : pour cette troisième visite dans l’Empire du milliard et demi, le président français a eu droit au tapis rouge, à La Marseillaise, aux 21 salves des canons de « la politesse » ou « des canons d’accueil » qui font trembler les murs du Palais du peuple quand se présente un hôte de marque… Trois jours, c’est court, mais cela aura quand même permis à Emmanuel Macron de s’entretenir avec Xi Jinping pendant près de sept heures, de mettre son interlocuteur face à ses contradictions sur l’Ukraine et de faire passer des messages.

La Chine reste mesurée vis-à-vis de la Russie

Reste qu’après les sourires, on attend maintenant des actes concrets côté chinois. Et là, pas sûr que le volontarisme suffise. Comme le Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, Emmanuel Macron a redemandé à Xi Jinping d’appeler son homologue ukrainien, Volodymyr Zelensky. Avec à chaque fois la même réponse : « Je le ferai quand les conditions seront réunies », dit le numéro un chinois.

Bol à moitié vide encore : le tandem « bon flic, méchant flic » avec Ursula von der Leyen, et la réunion trilatérale avec le président chinois, n’ont pas donné lieu à une déclaration commune. « Le vert est la base de notre relation », aurait dit le Premier ministre Li Qiang à la présidente de la Commission européenne, mais les autres dossiers font du sur place. Malgré l’insistance européenne et française, Pékin n’a toujours pas condamné l’intention du président russe Vladimir Poutine de vouloir stationner des missiles nucléaires tactiques en Biélorussie.

Enfin, la liberté de la presse ne sort pas renforcée de ce voyage : pour la première fois lors d’une visite présidentielle française en Chine, les correspondants français et étrangers ici n’ont pas été autorisés à couvrir la cérémonie au Grand Palais du peuple jeudi. À quelques exceptions près, officiellement faute de place, seuls les journalistes emmenés avec la délégation ont pu se rendre place Tiananmen.

Canton, un clin d’œil français avant le retour

Le choix de Canton pour ce dernier jour de voyage officiel reviendrait à la partie chinoise. Le dîner partagé par les deux présidents sera servi dans la résidence du gouverneur du Guangdong, lieu où a vécu le père de Xi Jinping, Xi Zhongxun qui a mis à exécution la politique d’ouverture de Deng Xiaoping. Une région que connaît bien aussi l’épouse du président chinois. Chanteuse dans l’Armée populaire de libération, cette dernière y a fait de nombreuses tournées.

Canton, c’est aussi un peu Nice en miroir. Xi Jinping aurait apprécié son étape sur la Côte d’Azur lors de son voyage en France en 2019. Il a voulu proposer ici à son invité une séquence similaire, entre climat du sud et dîner privé.

Pour l’aspect économique, Emmanuel Macron devrait rencontrer en fin de journée des investisseurs chinois. La région du Guangdong affiche un PIB similaire à celui de pays comme l’Italie ou la Russie, et de nombreuses entreprises françaises qui sont dans la délégation y sont installées depuis de longues années. Sans parler de la célèbre cuisine cantonaise et du football : un accord entre la Guangzhou Football Association et le club du FC Sochaux-Montbéliard a été signé en 2019. Un air du Sud et de liberté aux caractéristiques chinoises.

Cette province côtière a longtemps été considérée comme plus émancipée sur le plan de la presse et des syndicats notamment qui, bien que réprimés, y font résonner un chant différent de celui de la propagande. Ce vendredi après-midi, avant une rencontre privée avec Xi Jinping, Emmanuel Macron fait un discours à l’université Sun Yat-sen, jumelée avec l’université Lyon 3. C’est là que se trouve l’école sino-française d’ingénierie parrainée par EDF. Une intervention suivie par un rapide échange avec les étudiants.