Bénin : Talon parle de la réduction du droit de grève

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La semaine dernière, le président de la république a répondu à l’invitation du MEDEF et de l’ensemble des entrepreneurs français. Patrice Talon s’est prononcé sur les réformes. « Nous avons entrepris des réformes difficiles », dit-il. Donnant un exemple, notamment la réforme ayant touché un acquis des travailleurs à savoir la réduction du droit de grève, Patrice Talon affirme : « c’est quelque chose que j’évoque avec peine mais parfois avec fierté aussi, parce que nous avons réduit, au Bénin, le droit de grève ». Aux entrepreneurs français, le Président Talon leur a raconté en quelques minutes « ce qui s’est passé » afin de leur faire comprendre pourquoi cette réforme car dit-il, « on nous fait souvent ce grief un peu dans le monde que « le régime actuel s’est attaqué aux acquis démocratiques. »

« Vous dites que, pour être respectée, elle (l’action publique, ndlr) doit être efficace et se traduit par des réalisations qui soient à la fois concrètes et rapides. Vous l’avez dit, il y a beaucoup de choses qui ont été réalisées au Bénin depuis votre arrivée à la Présidence, mais est-ce que c’est pareil pour l’implication du secteur privé ? ». Voilà la préoccupation du modérateur qui a amené le président Talon à se prononcer sur la réduction du droit de grève au Bénin.  Patrice Talon raconte en quelques minutes aux entrepreneurs français ce qu’il s’est passé.

Patrice Talon: « Nous avons entrepris des réformes difficiles. Je donne un exemple. Quand vous vous attaquez aux acquis des travailleurs en matière de droit de grève, c’est quelque chose que j’évoque avec peine mais parfois avec fierté aussi, parce que nous avons réduit, au Bénin, le droit de grève. Je vais vous raconter en quelques minutes ce qu’il s’est passé et vous allez comprendre pourquoi car on nous fait souvent ce grief un peu dans le monde que « le régime actuel s’est attaqué aux acquis démocratiques. »

Quand je suis arrivé en 2016, nous avons eu une séance avec les partenaires sociaux au sujet des revendications des salariés du public et ils avaient des exigences démesurées. Et je leur ai dit : Regardez dans l’assiette, on n’a pas les moyens de satisfaire vos exigences. Le Bénin est un petit pays, nous collectons peu d’impôts. La pression fiscale est très faible par rapport au PIB. Je n’aime pas ce mot. Je préfère dire la contribution nationale fiscale. Elle est trop faible mais ils disent : on n’en a rien à faire, monsieur le Président, si vous ne faites pas, le pays sera paralysé. Je leur ai dit que je ne pense pas. A la fin de la séance, un des syndicalistes me dit : monsieur le Président, vous allez finir par céder. Je réponds : je veux bien ! Dès que les moyens seront là, nous allons céder. Il me dit : NON. Quand il commencera par avoir des morts dans les hôpitaux, dans les maternités, monsieur le Président, vous allez céder. Je regarde et je dis : La séance est levée. C’était un lundi. Le mercredi, en Conseil des ministres, je dis aux membres du gouvernement : Je vais arrêter de tout faire. Les routes, les hôpitaux, on va mettre tout ça de côté. On va s’attaquer au problème syndical, au problème des grèves. Nous allons légiférer pour réorganiser le droit de grève parce qu’un pays qui n’a pas de ressources et dans lequel les quelques-uns, grande minorité mais utile veut s’accaparer de tout ce qu’il y a au détriment des investissements en matière de santé, d’écoles et de routes, d’énergie…, ce n’est pas admissible. Et effectivement, j’ai rencontré les parlementaires, je les ai convaincus et nous avons légiféré.

Désormais au Bénin, la grève est interdite dans les secteurs vitaux comme la santé, la police, les pompiers, tout ce qui concourt à la survie des concitoyens. C’est interdit ! Dans les autres secteurs, la grève est limitée à deux jours maximum par mois, et 10 jours par an. C’est vrai, c’est un recul par rapport aux acquis démocratiques, mais vous savez, moi, je n’ai pas l’ambition d’avoir une expression démocratique identique à la France. Je vois des gens qui sont choqués. Je vais vous dire pourquoi. Quand des pays comme la France, l’Italie, les Etats-Unis, pays construits, organisés, structurés où la plupart des fondamentaux sont acquis, l’expression démocratique peut flirter avec l’anarchie. Ce n’est pas grave. Ça ne compromet pas la survie du pays. Moi, j’ai vu ici les gilets jaunes. J’ai vu combien ils ont été agressifs, très forts dans leurs revendications. Cela caractérise la France désormais. Nous sommes dans un pays où les gens votent pour élire un Président, des parlementaires pour légiférer, pour exécuter le programme pour lequel les gens ont été élus, mais au même moment, chacun conteste à l’élu le droit d’agir tout seul tant que la loi qui est votée n’est pas conforme à son aspiration personnelle, il dit niet. Il conteste, il empêche. C’est de l’anarchie. Je ne vais pas donner de leçon aux Français. Je vais exprès de provoquer sur des sujets aussi sensibles juste pour que vous puissiez comprendre la problématique qui est la nôtre. Quand un pays est construit, on peut ne pas avoir un gouvernement pendant 6 mois comme ce fut le cas en Belgique. Ce n’est pas un problème. On peut contester tout ce qui se fait, le pays n’est pas véritablement paralysé ».

La Rédaction