Sénégal : Pourquoi les vols de perruques se multiplient

Société

Au Sénégal, des voleurs de perruques, qui ont été arrêtés avec 91 pièces de seconde main dans un salon de coiffure, ont été condamnés fin septembre à deux ans de prison, dont trois mois fermes. Un phénomène récurrent dans la capitale sénégalaise alors que les perruques de cheveux naturels coûtent très cher. Exemples à Dakar.

Nogaye Sidy Fall, mère de famille de 42 ans, raconte comment, en quelques secondes, elle s’est fait arracher sa nouvelle perruque de cheveux naturels dans le marché populaire de Colobane, la veille de la rentrée scolaire 2022 du Sénégal : « D’un coup, je ne sens plus la perruque, quelqu’un l’a tirée, et quand je me suis retournée, je n’ai vu personne, donc j’ai crié : ‘‘Ma perruque, ma perruque !!’’ »

Valeur de ces mèches de cheveux frisés à la mode qui ont été volées : près de 300 000 francs CFA, soit environ 450 euros. Nogaye Sidy Fall ne peut pas se permettre d’avoir d’autres perruques à ce prix-là. « Je mets d’autres perruques synthétiques, ou bien demi-naturelles, explique-t-elle. Mais celle-là, c’était la bonne, c’était celle qui ne devait pas partir. Et puisque je n’avais pas déclaré à monsieur la valeur, je lui ai dit que c’était semi-naturel, et donc pas la peine d’aller à la police faire une déclaration ».

Si elle avait déjà entendu des histoires de vol de perruques, Nogaye Sidy Fall ne pensait pas que cela pouvait lui arriver, qui plus est en plein jour : « La crainte, c’est plutôt le soir. Si on sort entre femmes, avec mes cousines ou bien avec mes belles-sœurs, si on part à un événement, au retour, on enlève les perruques, on enlève les bijoux. Mais si on est accompagné des hommes, on n’a pas ce réflexe. »

« Avoir un salon qui vend des perruques, c’est comme une bijouterie »

Les voleurs visent aussi les salons de perruque dont plusieurs ont été cambriolés dans la capitale sénégalaise ces dernières années.

Arène Khouma, propriétaire du salon de coiffure Enera Beauty dans le quartier Ouest Foire à Dakar, est spécialisée dans les perruques de cheveux naturels depuis 2017. « Un salon qui vend des perruques, c’est comme si on avait une bijouterie en fait, nous explique-t-elle. Nous, on importe du Vietnam, les cheveux viennent déjà bruts, purs, sans produits chimiques, sans rien. Et quand elles arrivent ici, on les retravaille. Ce sont des cheveux qui coûtent excessivement cher. La moins chère des perruques, c’est une coupe carrée par exemple, c’est entre 165 000, ça peut aller jusqu’à 300 000, 400 000 [environ 600 euros, NDLR]. Mais nous, on achète par kilos. Ça dépend de la longueur. Ça peut aller jusqu’à un kilo à 200 000, mais nous, on s’est spécialisés dans ces produits parce que ce sont des cheveux qu’on peut garder très très longtemps, avec l’entretien qu’il faut ».

Des tarifs qu’Arène Khouma justifie : « On a des clientes qui ont leur perruque depuis 2016, 2017 et qui les portent jusqu’à présent, donc c’est un investissement on va dire. Nous, ce qu’on fait, c’est qu’on personnalise toutes les perruques, parce que tout le monde n’a pas la même forme de tête. Quand la cliente vient, par rapport à la forme de sa tête, on confectionne la perruque pour que ce soit sa perruque à elle ; personne d’autre ne peut porter sa perruque. Ce ne sont pas des confections de masse qu’on fait. C’est ce qui explique le prix. »

RFI