Colloque scientifique international sur «l’a-territorialité et la dé-territorialité de l'impôt» à Cotonou : Des experts échangent sur les mutations du monde fiscal

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(Le DG du CAFRAD, Dr Dieudonné Assouvi,  a présenté un panel sur «la promotion de la transparence dans les transactions internationales»)

Cotonou a abrité, du 14 au 15 octobre,  un colloque scientifique sur l’a-territorialité et la dé-territorialité de l’impôt. Une rencontre  qui a permis aux experts d’explorer les mutations profondes du système fiscal mondial face à la mondialisation et à la digitalisation des économies.  Dr Dieudonné Assouvi, DG du CAFRAD, a présenté un panel sur «la promotion de la transparence dans les transactions internationales».

Venus du Bénin, d’Afrique et d’ailleurs, chercheurs, hauts fonctionnaires, diplomates, experts en finances publiques et praticiens du droit fiscal ont pris une part active au colloque scientifique international sur le thème « Territorialité, dé-territorialité et a-territorialité de l’impôt : quelles conséquences pour le Bénin ? ».

A l’ouverture, Nicolas Yenoussi, directeur général des Impôts, y voit une opportunité pour plonger au cœur des défis contemporains que rencontrent les administrations fiscales. « La transformation rapide de l’économie mondiale marquée par la digitalisation et la mondialisation des échanges, érode inévitablement le socle de notre fiscalité traditionnelle, fondée sur une approche territoriale », a-t-il déclaré.

L’a-territorialité de l’impôt, fait-il savoir, s’analyse comme la perte du lien entre un revenu et un territoire national défini et rend désormais difficile l’ancrage géographique de la matière imposable. «Nos États font face à la dé-territorialité de l’impôt. Elle nous pousse à repenser l’attribution des droits d’imposition et à dissocier l’impôt d’un territoire national précis. C’est un enjeu de justice fiscale, de souveraineté économique et de financement du développement », a  insisté le directeur général des Impôts. Il a  invité les participants à trouver des mécanismes équilibrés pour éviter que les activités économiques, notamment les services numériques, quelle que soit leur localisation physique, n’échappent au fisc. La transformation rapide de l’économie mondiale marquée par la digitalisation massive et la mondialisation des échanges érodent le socle de la fiscalité traditionnelle basée sur une approche fondamentalement territoriale, dira-t-il par la suite.

Représentant le recteur de l’Université d’Abomey-Calavi, le professeur Romain Hounzandji a salué l’esprit de partenariat entre l’administration fiscale et le monde universitaire. « Chaque colloque que nous organisons illustre le rôle essentiel que joue l’Université d’Abomey- Calavi dans la production et la diffusion du savoir, et dans le rayonnement intellectuel de notre pays ». Il se dit satisfait pour le choix du thème de la rencontre qui s’inscrit dans la droite ligne de la volonté du président de la République de garantir la performance de la gouvernance financière au Bénin. « Les régies financières sont appelées à jouer un rôle central en tant que véritables moteurs de croissance. Cependant, certaines externalités négatives freinent notre élan. D’où la nécessité d’une synergie entre universitaires et praticiens pour venir à bout des maux qui minent notre système fiscal », a -t-il préconisé. Le professeur Hounzandji a insisté sur les effets pervers de la mondialisation qui constituent des freins à une fiscalité digne du nom. « Les paradis fiscaux, les prix de transfert, la perte de contrôle fiscal par les Etats ou encore l’inégalité fiscale constituent des menaces réelles pour la justice et la souveraineté économique », a-t-il déploré.

Hermann Orou Takou, directeur de cabinet du ministre d’État en charge de l’Économie et des Finances, a replacé le colloque dans le cadre des réformes structurelles engagées par le Bénin en matière de mobilisation des ressources intérieures. « La lutte contre les flux financiers illicites constitue un défi majeur pour nos économies. La notion de territorialité de l’impôt, qui fonde tout système fiscal, est aujourd’hui confrontée aux affres de la mondialisation et de l’économie numérique », rappelle-t-il. Il a expliqué ensuite que les concepts de « dé-territorialité » et « a-territorialité » ne sont pas de simples notions académiques, mais traduisent la réalité de l’évasion et de l’optimisation fiscales pratiquées par les multinationales. « Il est temps que l’impôt soit payé là où la valeur est créée. Il faut rétablir l’équité fiscale entre entreprises traditionnelles et acteurs de l’économie numérique », a-t-il plaidé. Saluant l’initiative du colloque, il a encouragé les participants à nourrir la réflexion sur les réformes de l’Ocde en matière d’érosion de l’assiette fiscale et transfert de bénéfices et sur l’instauration d’un impôt minimum mondial. « Les décideurs politiques attendent vos recommandations pour renforcer notre système fiscal et adapter notre droit national à ce nouvel environnement», lancera -t-il pour finir.

 

Débat scientifique de haut niveau

Présentant le rapport introductif du colloque, le professeur Nicaise Médé, président de la Société ouest-africaine de Finances publiques (Soafip), a rappelé que la dé-territorialisation de l’impôt ne doit pas être perçue comme une fatalité. « Il ne s’agit pas de subir la mondialisation, mais de repenser nos modèles fiscaux pour que la souveraineté économique et la justice fiscale aillent de pair », a plaidé l’enseignant.

Les panels prévus au cours des deux jours de travaux ont permis aux experts de disséquer les notions complexes de territorialité et de fiscalité transnationale. Sous la présidence du professeur Eloi Diarra, le premier panel a ouvert la réflexion sur les contours juridiques du territoire fiscal. Le Camerounais Serge François Sobze, agrégé des facultés de droit, a apporté une « clarification conceptuelle essentielle » entre territorialité, dé-territorialité et a-territorialité. Le chercheur Fiacre Avahoundjè s’est, quant à lui, interrogé sur « l’impossible définition conceptuelle du paradis fiscal ».

 

Le DGl du CAFRAD, donne une communication sur « la promotion de la transparence dans les transactions internationales »

Erick Maxime Mensah Akakpo-Djihountry a exposé les défis posés par « l’effacement des territoires fiscaux à l’ère du numérique », tandis que Géraud Fagbémi et Philippe Accalogoun ont analysé la question sensible des prix de transfert et de leur typologie en Afrique. L’avantage, c’est de recueillir des propositions pour une fiscalité plus équitable. Autre panel important, celui présidé par Abdoulaye Hamadou pour explorer les pistes de réformes possibles. Le docteur Mohamed Najib Diop a pour sa part, défendu l’idée d’un « impôt minimum mondial », tandis que le docteur Dieudonné Assouvi, Directeur général du CAFRAD, a exposé sur « la promotion de la transparence dans les transactions internationales ».

Docteur de droit public de l’Université de Limoges en France, Docteur de science politique de l’Université d’Abomey-Calavi, au Bénin, Diplômé de l’ENA de France, Promotion Emile Zola 2008-2010, et de l’ENA du Bénin, Chercheur associé au Centre d’Etudes et de Recherches sur l’Administration et les Finances (CAERAF), Ambassadeur, Fonctionnaire international, Directeur général du CAFRAD, Rabat, Maroc, Expert en droit de l’environnement, droit économique, fiscalité internationale et financement du développement durable et inclusif, Spécialiste des questions de gouvernance, de géopolitique, de géostratégie de géoéconomie et des problématiques d’intérêt pour l’Afrique dont la gouvernance des ressources naturelles et/ou matières premières stratégiques, Docteur Dieudonné Assouvi est aussi Interprète critique des évolutions de la société postmoderne liquide et des mutations de l’économie mondiale. Spécialiste de la transformation de l’action publique, de l’obsolescence des compétences et des métiers du futur, il a présenté un panel sur la promotion de la transparence dans les transactions internationales. Il s’agit ici d’études de cas basées sur la fiscalité minière, la fiscalité pétrolière, les brasseries, etc. Exemples concrets à l’appui, le communicateur a apporté des éléments vivants pour illustrer une notion et essayer de dresser une typologie et des approches de solutions.

Nicolas Yenoussi, dans une autre communication, a plaidé pour un renforcement des capacités des administrations africaines afin de ne pas rester à la traîne de la révolution numérique et financière. Deux diplomates béninois, Marius Loko, ambassadeur au Koweït et Angelo Dan, représentant auprès des Nations Unies à Genève, interviendront aussi pour aborder respectivement « le profit en droit musulman » et « les défis de la facilitation du commerce international dans le cadre de l’Omc ».

La rencontre est portée conjointement par la direction générale des Impôts, le Centre d’études et de recherches sur l’administration et les finances et la Société ouest-africaine de Finances publiques.

 

E.A.T.

Colloque de Cotonou Transparence (1)