Europe : Washington publie une vidéo du drone américain abattu en mer Noire

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Un drone américain s’est abîmé mardi 14 mars en mer Noire. La faute, selon Washington, à des avions de chasse russes. Moscou dément être à l’origine du crash, mais reconnaît quand même avoir intercepté l’appareil, y voyant surtout une preuve de l’implication américaine dans le conflit en Ukraine. Ce drone de surveillance, un Reaper MQ 9, volait dans l’espace aérien international, affirment les Américains, qui espèrent en récupérer les débris. Washington a publié les images de l’interception. 

La tension diplomatique est vive entre la Russie et les États-Unis après la chute de ce drone. Le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou, a estimé, mercredi 15 mars, que l’une des causes de l’incident était le « renforcement » des opérations d’espionnage américaines contre les intérêts russes. « La Russie ne souhaite pas une telle évolution des événements, mais elle réagira désormais proportionnellement à toute provocation », indique le ministre dans un communiqué.

Le Reaper MQ-9 est tombé dans les eaux internationales. La Russie estime que le drone est entré au large de la péninsule de Crimée annexée en 2014, dans une zone d’exclusion aérienne qu’elle a elle-même décrétée pour son opération en Ukraine.

« Je ne peux pas parler à ce stade d’un motif ou d’une intention [de la part des Russes, NDLR], mais ce que je peux dire très clairement, c’est qu’il s’agissait d’une action irréfléchie et dangereuse », a déclaré le secrétaire d’État, Antony Blinken, en visite à Addis-Abeba.

Une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux

La vidéo d’une quarantaine de secondes a fait l’objet d’un montage. Elle vient du commandement américain en Europe. On y voit un appareil russe, un Sukhoi 27 arriver par l’arrière sur le drone Reaper non armé et, dans un premier temps, tenter de l’asperger de ce que l’armée américaine dit être du carburant, rapporte notre correspondant à Washington, Guillaume Naudin.

Sur le premier passage, aucun choc n’est visible entre les deux appareils, ni rien qui semble justifier la chute du drone. La manœuvre « perturbe la transmission vidéo », commente le site de l’armée américaine en Europe, qui relève que l’hélice du drone « peut être vue et reste intacte ».

Un deuxième passage et une deuxième tentative semblent beaucoup plus proches et concluants. L’image est ensuite perdue pendant environ 60 secondes, dit l’armée américaine. Lorsqu’elle reprend, « l’hélice peut être vue de nouveau et on peut constater qu’une des pales est endommagée », commente l’US Air Force.

La collision n’est pas visible. Lors d’un second passage, la manœuvre est semblable, mais l’appareil passe encore plus près du drone. La transmission des images est interrompue.

Selon un haut responsable américain, ces images confirment absolument qu’il y a eu un contact entre le drone américain et les appareils russes, ce que la partie russe avait démenti.

L’incident, le premier entre les deux pays depuis e début de la guerre en Ukraine, a provoqué un rare coup de téléphone entre le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin et son homologue russe Sergueï Choïgou. Les deux puissances se renvoient la responsabilité de l’affaire. La Russie dit vouloir récupérer les restes de l’appareil américain qui s’est abîmé en mer. Une activité navale russe inhabituelle est signalée sur la zone par les États-Unis.

Des débris convoités

La Russie a annoncé qu’elle allait s’efforcer de retrouver l’appareil et de le récupérer pour en analyser les équipements d’observation très perfectionnés. C’est donc une véritable course contre-la-montre qui s’engage.

« Il semble que le drone a été endommagé au niveau de l’hélice qui est à l’arrière et qu’à ce moment-là, l’équipage – qui n’est pas dans le drone, qui est dans une station au sol – a décidé en quelque sorte de faire plonger le drone dans la mer », analyse le général Jérôme Pellistrandi, rédacteur en chef de la Revue Défense Nationale. « On sait exactement où il est, et les Américains, de toute façon, vont tout faire pour récupérer ce drone. Il est hors de question, par exemple, que les Russes récupèrent les débris du drone. Il va donc y avoir en quelque sorte course de vitesse », complète le général français.

L’absence de bâtiment militaire américain dans cette zone est toutefois un obstacle. « La convention de Montreux, qui gère les détroits, fait qu’il ne peut pas y avoir ces bâtiments américains, mais les Américains vont peut-être s’appuyer sur leurs alliés, notamment la Roumanie », estime le général Jérôme Pellistrandi.

Kiev accuse Moscou de vouloir « étendre la zone de conflit »

Kiev, de son côté, accuse les forces russes d’avoir délibérément fait chuter le Reaper pour envoyer un message à Washington, alors qu’elles sont à la peine dans leurs tentatives de gagner du terrain en Ukraine. Pour Oleksiï Danilov, secrétaire du Conseil de sécurité ukrainien, l’incident est « un signal de Poutine qu’il est prêt à étendre la zone du conflit et à y impliquer d’autres parties ».