Cédéao : Multiplication des accords bilatéraux en faveur du «free roaming»

Afrique

Malgré l’adoption en 2017 d’un « règlement relatif aux frais d’itinérance sur les réseaux mobiles dans l’espace Cédéao », les habitants de la sous-région continuent bien souvent de payer leurs appels et leurs données au prix fort lorsqu’ils sortent de leur pays. À moins qu’ils n’achètent une SIM locale à chaque déplacement. Mais ces derniers mois, plusieurs accords bilatéraux ont été signés entre régulateurs nationaux, afin de faire baisser drastiquement les frais d’itinérance. Le Togo, le Bénin, le Ghana, le Gabon ou encore la Côte d’Ivoire ont par exemple commencé à s’entendre sur le sujet.

En plein cœur de la capitale togolaise, à quelques mètres seulement de la frontière avec le Ghana, Idayatu vend des savons et des produits de beauté sur un petit stand : « Moi, je vais à Lagos pour acheter les marchandises, pour les ramener ici ».

Mais, à chaque fois qu’elle passe une frontière, Idayatu est forcée d’acheter une nouvelle carte SIM pour communiquer. « J‘ai une SIM du Nigeria, une pour le Ghana, une pour le Togo. Et même une pour la Côte d’Ivoire aussi. Si tu as besoin, c’est normal, tu vas payer » déplore-t-elle.

Frais d’itinérance réduits pour 2024

Pourtant, la Cédéao a adopté dès 2017 une initiative relative à l’itinérance des données. Un règlement communautaire qui a du mal à être appliqué jusque-là. Yoavi, qui tient un bureau de change à cent mètres de la frontière ghanéenne, se plaint du coût élevé du roaming : « Parfois, quand tu rentres au Ghana, ta SIM se met directement en « roaming ». Et ça va couter cher pour toi et pour celui que tu appelles. »

Pourtant, les choses sont sur le point de changer. Le Togo a signé récemment des accords bilatéraux de free roaming avec le Bénin, le Ghana ou encore le Mali. À partir de début 2024, les frais d’itinérance entre ces pays vont être drastiquement réduits.

« Dans un premier temps, la réception d’appels est gratuite pour ces clients, alors que dans le roaming courant, la réception d’appels est facturée. Alors que là, elle est gratuite pour un séjour consécutif de 30 jours dans le pays visité. Et dans un second temps, lorsqu’il utilise son numéro dans le pays visité, les tarifs ont été étudiés de telle sorte qu’ils ne dépassent pas les tarifs qui sont appliqués par les opérateurs du pays visité », explique Aissatou Diallo, la directrice du marketing et de la communication pour l’opérateur Togocom.

Un coût pour les opérateurs 

Avec ces accords bilatéraux, les régulateurs nationaux espèrent utiliser les communications comme un vecteur de développement et d’intégration régionale.

La baisse tarifaire prévue est importante : au moins 60% de réduction sur les appels passés depuis le Bénin vers le Togo par exemple. Et elle concerne aussi les données. Hervé Coovi Guedegbe est le secrétaire exécutif de l’autorité de régulation des communications du Bénin – il constate que le règlement de la Cédéao n’est pas suffisamment mis en œuvre : « Avant ces accords, vous êtes exclus lorsque vous passez de l’autre côté, parce que le service d’itinérance data, peut-être que votre fournisseur système ne l’a pas en contrat avec un opérateur du pays visité… Et quand il l’a, vous étiez dans des tarifs de l’ordre de 1 500 à 2 000 Francs CFA le mégaoctet… Avec ces accords, les opérateurs ont concédé que le mega ne dépasserait pas les 2,22 Francs CFA. »

Ces mesures ont bien sûr un coût pour les opérateurs téléphoniques, qui tablent sur la fidélité de leurs clients, même à l’étranger.