En réponse au président américain qui a menacé à deux reprises, vendredi 23 mai, d’imposer des droits de douane de 50% à l’Union européenne dans l’espoir de la diviser pour imposer aux 27 des accords commerciaux séparés, Bruxelles a déclaré travailler de « bonne foi » pour obtenir un accord commercial avec les États-Unis fondé sur le « respect » et non sur les « menaces ».
« Nous sommes prêts a défendre nos intérêts. » C’est ainsi que le commissaire européen au Commerce, Maros Sefcovic, a répondu à Donald Trump, dans la soirée du vendredi 23 mai, quelques heures après que celui-ci a menacé à deux reprises d’imposer à l’Union européenne (UE) des tarifs douaniers de 50% à compter du 1er juin.
Alors que le président américain estime que les négociations en cours avec Bruxelles ne vont nulle part, l’UE travaille de « bonne foi » pour obtenir un accord commercial avec les États-Unis a ajouté Maros Sefcovic, estimant que le commerce entre les deux partenaires devait « être guidé par le respect mutuel, non par des menaces ».
Juste avant, celui-ci venait de s’entretenir par téléphone avec Jamieson Greer, son homologue en charge du commerce international à Washington. La conversation intervenant après les menaces proférées par Donald Trump, elle ne pouvait pas changer leurs positions respectives alors que côté européen, on rappelle aussi que les 27 sont déjà soumis à des droits de douane de 25% sur l’acier et de 25% sur l’automobile, ainsi qu’à des droits de 10 % abusivement baptisés par Donald Trump de « réciproques » et imposés à l’ensemble des pays du monde.
Reste toutefois la question de savoir si ces nouvelles menaces peuvent aussi rebattre les cartes des négociations en cours et là, rien n’est moins sûr non plus. Alors que le président américain avait déjà menacé l’UE de tarifs douaniers généraux de 25% (actuellement partiellement soumis à une pause de 90 jours) et de 200% sur les alcools, les Européens peuvent légitimement penser en effet qu’il ne s’agit là que d’une nouvelle posture des États-Unis, alors qu’ils ont eux-mêmes mis en pause leurs mesures de rétorsion et dévoilé un arsenal de contre-mesures à hauteur de 100 milliards d’euros d’importations américaines, n’excluant pas non plus de frapper les géants américains de l’Internet dans leurs activités commerciales sur le Vieux Continent.
« C’est décidé, c’est 50% »
L’UE a en outre les moyens de tenir bon face à ce nouveau coup de menton de Donald Trump estime Damien Ledda, directeur de la gestion chez Galilee Asset Management : « L’Europe représente un poids économique très important, elle reste l’un des plus grands blocs économiques au monde avec un pouvoir d’achat massif et un excédent commercial significatif avec les États-Unis », explique celui-ci. « Elle peut par conséquent exercer des pressions crédibles sur des entreprises américaines fortement exposées à l’Europe, notamment dans les secteurs de la technologie, de l’agriculture et de l’aviation. Si l’UE réagit de la même manière que les États-Unis, les conséquences économiques pourraient être importantes pour Washington », poursuit-il.
Après avoir menacé une première fois les Européens peu avant 8 heures du matin heure de la côte est, aux États-Unis, Donald Trump avait quant à lui remis le couvert, quelques heures plus tard, cette fois dans le bureau ovale, affirmant qu’il s’agissait là de sa manière de négocier. « J’ai juste dit qu’il est temps de jouer de la façon dont je sais jouer. Je ne recherche pas un accord. C’est décidé, c’est 50%. On verra bien ce qu’il se passe, mais au moment ou l’on parle, ça commencera le 1er juin et c’est comme ça. Ils ne nous traitent pas bien. Ils ne traitent pas bien notre pays. Ils se sont mis ensemble pour profiter de nous. Mais une fois encore, il n’y aura pas de droits de douane s’ils construisent leurs usines ici. Maintenant si quelqu’un arrive et veut construire une usine ici, on pourra toujours parler d’un report ou d’une suspension, le temps de construire l’usine. Ce serait approprié… Peut-être », a déclaré le président américain, qui a aussi profité de l’occasion pour rappeler qu’il s’était mis d’accord avec le Royaume-Uni et avec la Chine.
Dans le second cas, c’était après que Pékin a répliqué aux droits de douane américains et que tout le monde se rende compte qu’il fallait peut-être revenir à la raison avant que l’escalade ne dégénère…
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Droits de douane: que sait-on des négociations Union européenne-États-Unis?
L’objectif premier de Donald Trump, c’est de réduire le déficit commercial des États-Unis vis à vis de l’Europe. Autrement dit, que l’Europe achète plus de produits américains. Du gaz, par exemple. Mais aussi du boeuf texan, du poulet du Kentucky ou encore du blé du Kansas. Sauf que les normes sanitaires européennes interdisent l’entrée sur le continent de viande d’animaux traités aux hormones ou encore de céréales génétiquement modifiées.
D’après les informations du Financial Times, l’Union européenne serait prête à négocier un assouplissement des procédures dans ce domaine. Bruxelles propose par ailleurs d’appliquer zéro droits de douane sur les produits industriels et sur certains produits agricoles. Mais, si, et seulement si, les États-Unis font la même chose de leur côté.
C’est une proposition insuffisante aux yeux de Washington. La menace de Donald Trump d’appliquer 50% de droits de douane sur les produits du Vieux continent intervient alors que le commissaire européen au Commerce et le représentant américain chargé du même dossier doivent se rencontrer à Paris le mois prochain.