Après sa fermeture par les autorités du MEMP : Les parents des apprenants plaident pour la réouverture du  « Centre d’éveil du continent noir » Gbekoun  

Santé & Culture

(Ils demandent aux gouvernants de ne pas jeter « l’eau de bain du bébé avec le bébé »)

Les portes du « Centre d’éveil du continent noir » ont été fermées aux apprenants par le gouvernement le 24 mars 2022. Au cours d’une conférence de presse, mercredi 4 mai 2022 à la Bourse du travail à Cotonou, les parents des apprenants ont plaidé pour sa réouverture tout en montrant le bien de ce centre qui forme en langues nationales.

Le « Centre d’éveil du continent noir » donne l’enseignement en langue nationale Fon grâce à l’alphabet « Gbékoun ». Il permet aussi aux apprenants d’effectuer des calculs dans leurs langues maternelles et autres. Les parents des apprenants plaident pour la réouverture de ce « Premier Centre d’Eveil du Continent Noir » de mise en application du système éducatif en langue nationale fondé sur l’alphabet « Gbékoun », système mis en place par Feu HOUESSE AYIGBEDEKIN Vidéhouénou, successeur de feu ADIGBE Togbédji, inventeur de « Gbékoun », l’alphabet à 33 lettres.

En effet, par une décision en date du 24 mars 2022, le gouvernement a ordonné, à travers le ministère des enseignements maternel et primaire la fermeture du centre avec effet immédiat. Pour l’association des parents des apprenants de ce centre, les raisons évoquées par le gouvernement portent sur la forme et non sur le fond. Le gouvernement a notifié, dans cette décision que l’ouverture d’une école au Bénin est subordonnée à une autorisation préalable de l’Etat.

A travers leur conférence de presse, les parents invite le gouvernement à mettre « en place avec le groupe de promotion de l’alphabet ‘’Gbékoun’’ un cadre adéquat pour la continuation jusqu’à terme de cette expérience patriotique unique en son genre ». Ils soutiennent leur doléance par l’article 8 de la loi 2003-17 portant Orientation de l’éducation nationale en république du Bénin qui stipule : « L’enseignement est dispensé principalement en français, en anglais et en langues nationales. » Selon le même article, « les langues nationales sont utilisées d’abord comme matière et ensuite comme véhicule d’enseignement dans le système éducatif. En conséquence, l’Etat doit promouvoir les recherches en vue de l’élaboration des instruments pédagogiques pour l’enseignement des langues nationales aux niveaux maternel, primaire, secondaire et supérieur. »

« …ne pas jeter « l’eau de bain du bébé avec le bébé »

L’association des parents des apprenants souhaite la mise en place du système éducatif formel en langue nationale pour que les milliers de parents d’apprenants volontaires qui la composent, puissent inscrire leurs enfants conformément aux dispositions de l’article 12 de la constitution béninoise.

A en croire l’Association, le groupe des adultes apprenant le « Gbékoun » est disponible à accompagner le gouvernement dans la mise en œuvre du système éducatif authentique en langue nationale fondé sur l’alphabet « Gbékoun ».

Selon Hippolyte Dossou Cossi, l’un des parents d’apprenants du centre, à cette conférence de presse, « Gbékoun » est un alphabet de 33 lettres dont 24 consonnes et 9 voyelles. Il est à la fois phonétique et syllabique. « Gbékoun » est étudié dans une école pilote, « le Centre d’éveil du continent noir » depuis 1996. Et ceci, après avoir été mis en place par Feu Houessè Ayigbedekin Vidéhouénou, successeur de feu Adigbé Togbédji, inventeur de « Gbékoun » en 1994. C’est un outil de développement, font savoir les parents des apprenants qui plaident pour la réouverture de l’école et permettre au gouvernement de voir de visu l’importance de l’alphabet « Gbékoun ». Ils demandent « humblement à nos gouvernants de ne pas jeter « l’eau de bain du bébé avec le bébé ». Lire l’intégralité de la conférence de presse.

Armelle C. CHABI

 

Conférence de presse de l’association des parents des apprenants du « premier centre d’éveil du continent noir »  (Fifontin Noukonton Minwouigbédjiton) par suite de la fermeture du « Premier Centre d’Eveil du Continent Noir » de mise en application du système éducatif en langue nationale fondé sur l’alphabet « Gbékoun », système mis en place par Feu HOUESSE AYIGBEDEKIN Vidéhouénou, successeur de feu ADIGBE Togbédji, inventeur de « Gbékoun », l’alphabet à 33 lettres.

Date : Mercredi 4 mai 2024 Lieu : Bourse de Travail à Cotonou

Mesdemoiselles, mesdames et messieurs
Nous sommes devant vous ce matin en tant que parents d’apprenants du « Premier Centre d’Eveil du Continent Noir ».

C’est donc l’association des parents d’apprenants du système éducatif en langue nationale fondé sur l’alphabet « Gbékoun » qui s’adresse aux gouvernants et au peuple.

Chers compatriotes,

Pour ceux qui ne le savent pas encore, le gouvernement a pris le 24 mars 2022 la décision N°076/MEMP/DC/SGM/CTAAS/CCJ/DPP/DEP/SP de fermeture du « Premier
Centre d’Eveil du Continent Noir » avec effet immédiat.
A la lecture de la décision suscitée, nous remarquons que les raisons évoquées et justifiant la fermeture du centre portent essentiellement sur la forme. Qu’en est-il donc du fond de cette situation ?

L’objectif de cette conférence est essentiellement d’apporter des éléments d’appréciation sur le fond.

Par souci de précision le « Premier Centre d’Eveil du Continent Noir» a été créé en 2016 par le compatriote Feu HOUESSE AYIGBEDEKIN Vidéhouénou, après la mise en place par ses soins d’un système éducatif en langue nationale fondé sur « Gbékoun », alphabet à 33 lettres inventé par Feu ADIGBE Togbédji en 1994 ; il y a donc vingt-huit (28) ans.  En tant que parents qui avons volontairement inscrit nos enfants dans le « Premier Centre d’Eveil du Continent Noir » qui aujourd’hui est fermé par le gouvernement, nous avons pensé qu’il était opportun de nous adresser au peuple et à nos gouvernants sur un certain nombre d’éléments d’appréciation délibérément ignorés et non-dits.

  1. Pourquoi avons-nous inscrit nos enfants au « Premier Centre d’Eveil du Continent Noir », un centre où l’enseignement se fait intégralement en langue nationale et suivant nos réalités linguistiques ?

Nous avons inscrit nos enfants au « Premier Centre d’Eveil du Continent Noir » pour les raisons principales suivantes :

  1. Nous avons pris conscience qu’aucun peuple ne se développe véritablement en délaissant ses langues autochtones au profit d’une langue étrangère comme langue d’enseignement et de communication. Car en faisant ainsi ce peuple perd ses langues autochtones qui sont le fondement même de sa culture et donc de son existence.

Nous retrouvons d’ailleurs cette prise de conscience qui s’exprime dans l’article 11 de la loi 90-32 portant constitution de la République du Bénin que voici :

ARTICLE 11. – Toutes les communautés composant la Nation béninoise jouissent de la liberté d’utiliser leurs langues parlées et écrites et de
développer leur propre culture tout en respectant celles des autres.
L’Etat doit promouvoir le développement des langues nationales
d’intercommunication.
b. Les résultats probants du système éducatif formel actuel dont
l’enseignement est exclusivement en langues étrangères :

  • La disparition lente et continue de toutes nos langues autochtones au profit des langues étrangères notamment le français, l’anglais etc.
    • Le taux élevé d’échec scolaire dont la raison principale se trouve dans les difficultés que rencontrent les enfants qui doivent apprendre dès les premiers jours à l’école une langue étrangère qui ne vient même pas de leur environnement linguistique.
  • Le taux élevé de chômage des jeunes qui pourtant ont suivi et fini
    leurs études universitaires. Preuve qui ne dément pas la stérilité du
    système en place depuis lors.

Comme nous le savons tous aucun parent ne voudrait qu’après 17 à 20 années d’études son enfant soit un chômeur qu’il faut continuer à entretenir ou que cet enfant n’ait pour objectif que d’immigrer dans un autre pays pour soi-disant « aller se chercher » ; au moment où le pays végète dans un besoin criard de compétences pour se développer dignement.Nous les parents d’enfants inscrits au « Premier Centre d’Eveil du Continent Noir » (Fifontin Noukonton Minwouigbédjiton) ne voulons à aucun moment vivre cela avec nos enfants.

  1. Notre ferme conviction que seul le peuple peut se sortir lui-même de la pauvreté par l’usage de ses langues pour résoudre tous ses problèmes et satisfaire ses besoins essentiels quotidiens. Et ceci commence déjà à partir de l’éducation authentique qu’on donne à l’enfant.
    d. Nous avons pris conscience que tout être humain est le résultat de son éducation dès le bas âge et de son environnement. Et donc tout être humain est le produit d’un système. L’enfant est le père de l’homme, dit-on.
  2. Le fait que notre pays a besoin pour son développement de citoyens plus aguerris, dotés d’une nouvelle conscience, nous oblige à une lucidité sans pareil dans le choix du système éducatif à offrir à nos enfants.

 

  1. Nos constats en tant que parents d’apprenants

En 5 années de mise en œuvre du système éducatif en langue nationale fondé sur « Gbékoun » voici les constats que nous avons faits en tant que parents d’apprenants.

  1. Nos enfants savent merveilleusement lire, écrire et calculer dans une langue nationale en l’occurrence la langue d’intercommunication Fongbé. Ceci déjà à partir de la 2ème année académique quel que soit leur langue d’origine.
  2. Nos enfants savent très bien lire, écrire et calculer aussi dans leur langue maternelle respective.
  3. Nos enfants sont éveillés et s’expriment très bien sans complexe ni bégaiement.
  4. Nos enfants sont conscients du temps, de l’espace, des objets, du monde moderne et de leur propre corps. Ils désignent donc en langue nationale les objets de leur environnement, du monde moderne et les parties et organes externes et internes du corps.
    e. Nos enfants ont appris à vivre en groupe et à travailler en équipe et s’adaptent aisément aux situations nouvelles, dans leur diversité ethnique.
  5. Nos enfants sont très aguerris et ont un sens patriotique très élevé.
  6. Nos enfants sont conscients de l’équilibre et de l’harmonie qu’il faut maintenir entre l’Homme et son environnement (la nature) pour un développement durable et continu.
  7. La notion d’équité et d’égalité dans le genre, les races est apprise sans haine.

Leur humanité s’affirme à chaque occasion.
En bref ; nous pouvons dire sans risque de nous tromper que les objectifs poursuivis par notre État à travers l’enseignement primaire tels définis à l’article 25 de la loi 2003-17 portant Orientation de l’Éducation Nationale en République du Bénin, sont
atteints avec ce système d’instructions en langue nationale fondé sur « Gbékoun ».

Article 25. – L’enseignement primaire poursuit les objectifs ci-après :
– L’apprentissage de la lecture, de l’écriture et du calcul ;
– Le développement chez l’enfant de la conscience du temps, de l’espace, des objets, du monde moderne et de son propre corps ;
– L’apprentissage de la vie de groupe et du travail en équipe dans le contexte de vie démocratique ;

– L’acquisition de compétences et d’aptitudes qui rendent l’élève capable d’apprendre seul et de pouvoir s’adapter aux situations nouvelles.
Suivant le programme établi par le fondateur de ce système éducatif, nos enfants devraient à partir de la 2ème phase de leur formation (le secondaire) être initiés aux métiers essentiels de subsistance à savoir : l’agropastoral, la bonne santé et la guérison des maladies, le textile, la maçonnerie, la construction mécano-soudée, l’enseignement etc.

Ainsi les apprenants sortis en fin de formation dans ce système seront prêts à servir
immédiatement leur nation en tant que travailleurs professionnels et non chercheurs d’emploi.

Malheureusement la décision du gouvernement est venue mettre brusquement fin
à une initiative patriotique qui avait pour but de servir d’expérience pilote.

  1. Les doléances des parents des apprenants au gouvernement.

Nous rappelons que nous les parents des apprenants du « Premier Centre d’Eveil du Continent Noir » avions fait il y a cinq ans le choix conséquent d’inscrire nos enfants dans une école dont les enseignements sont dispensés en langue nationale.

Vus les résultats probants cités plus haut, nous parents des apprenants du « Premier Centre d’Eveil du Continent Noir » demandons humblement à nos gouvernants de ne pas jeter « l’eau de bain du bébé avec le bébé ».

Nous demandons à l’Etat :

  1. La mise en place avec le groupe de promotion de l’alphabet « Gbékoun » d’un cadre adéquat pour la continuation jusqu’à terme de cette expérience patriotique unique en son genre. Ceci dans le cadre de l’article 8 de la loi 2003-17 portant Orientation de l’Education Nationale en République du Bénin.

Article 8. – L’enseignement est dispensé principalement en français, en anglais, et en langues nationales.

Les langues nationales sont utilisées d’abord comme matière et ensuite comme véhicule d’enseignement dans le système éducatif.
En conséquence, l’Etat doit promouvoir les recherches en vue de l’élaboration des instruments pédagogiques pour l’enseignement des langues nationales aux niveaux maternel, primaire, secondaire et supérieur.

  1. La mise en place du système éducatif formel en langue nationale pour que les milliers de parents d’apprenants volontaires que nous sommes puissions inscrire nos enfants conformément aux dispositions de l’article 12 de la loi 90-32 portant Constitution de la République du Bénin.

ARTICLE 12. – L’Etat et les Collectivités publiques garantissent l’éducation des enfants et créent les conditions favorables à cette fin.

C’est l’occasion de faire remarquer ici que les écoles enseignant en langues étrangères sur le territoire national n’enseignent dans aucune des langues de notre pays. D’ailleurs aucun expatrié tout comme béninois d’origine étrangère naturalisé et vivant au Bénin ne cherche guère à apprendre au moins une de nos langues nationales et on s’est toujours posé la question de savoir exactement pourquoi ?

Pour finir nous réitérons le souhait et la disponibilité du groupe des adultes apprenant le « Gbékoun », à accompagner le gouvernement dans la mise en œuvre du système éducatif authentique en langue nationale fondé sur « Gbékoun », l’alphabet à 33 lettres. Et ainsi permettre à notre nation de gagner son autonomie linguistique. Et nous parents d’apprenants ayant inscrit nos enfants au « Premier Centre d’Eveil du Continent Noir » certifions en face du monde que le système éducatif instauré dans ledit centre en est capable.