Les députés de la minorité désapprouvent la procédure judiciaire

Politique

Les députés de la minorité parlementaire sont contre la procédure judiciaire engagée contre leur collègue Atao Hinnouho. Ils parlent de la violation de l’article 90 de la constitutionnelle. Lire l’intégralité de la déclaration lue au Parlement ce lundi 07 mai 2018.

DÉCLARATION A LA TRIBUNE DE L’ASSEMBLEE NATIONALE DES DÉPUTÉS DE LA MINORITÉ PARLEMENTAIRE

Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale,
Honorables députés, chers collègues,
Au nom de la minorité parlementaire, je me fais l’obligation de nous rappeler, du haut de cette tribune, les fondements de notre démocratie ainsi qu’ils découlent du préambule de la Constitution du 11 décembre 1990 :
‘’Nous, Peuple béninois

Réaffirmons notre opposition fondamentale à tout régime politique fondé sur l’arbitraire, la dictature, l’injustice (…), la confiscation du pouvoir et le pouvoir personnel ;
Exprimons notre ferme volonté de défendre et de sauvegarder notre dignité aux yeux du monde et de retrouver la place et le rôle de pionnier de la démocratie et de la défense des Droits de l’Homme (…) ;
Affirmons solennellement notre détermination (…) de créer un Etat de droit et de démocratie pluraliste dans lequel les droits fondamentaux de l’homme, les libertés publiques, la dignité de la personne humaine et la justice sont garantis, protégés et promus (…) ‘’.
J’ai la triste obligation de relever, du haut de cette tribune, que ces fondements tanguent, vacillent sous les coups violents et répétés du gouvernement de la rupture et que, le cas de notre collègue Mohamed Taofick Hinnouho est la plus patente illustration de l’effondrement de l’Etat de droit.
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs, les honorables députés
Les députés de la minorité parlementaire sont venus dire ici et marteler leur désapprobation et leur indignation.
Nous sommes indignés parce que notre Loi Fondamentale condamne l’arbitraire et qu’ici, dans notre pays, un élu de la Nation est victime d’arbitraire au vu et au su de tous.

Nous sommes indignés parce qu’un député est victime d’injustice, et qu’ici au Parlement, rien ne laisse entrevoir que notre institution s’en émeuve. Nous voulons, ici, rappeler à notre mémoire la citation de Martin NIEMOLIER qui dit : « quand ils sont venus chercher les communistes, je n’ai rien dit, je n’étais pas communiste ; quand ils sont venus chercher les syndicalistes, je n’ai rien dit, parce que je n’étais pas syndicaliste ; quand ils sont venus chercher les juifs, je n’ai rien dit, parce que je n’étais pas juif. Et quand ils sont venus me chercher, il ne restait plus personne pour dire grande chose ou protester avec moi ». Et à DALAI Lama de nous enseigner je cite : « l’amour et la compassion sont des nécessités, pas un luxe. Sans eux, l’humanité ne peut pas survivre. » Enfin Albert Einstein nous enseigne : « le monde est dangereux à vivre, non pas tant à cause de ceux qui font le mal, mais à cause de ceux qui regardent et laissent faire ».

Nous sommes indignés Mr le Président parce que le pouvoir judiciaire vient d’être gaillardement confisqué par l’Exécutif, par l’œuvre et les agissements de Mr Joseph Djogbénou, Garde des Sceaux, en violation de notre Constitution et du Code de procédure pénale que vous et nous avions voté et ceci par son intrusion scandaleuse et inacceptable dans la procédure ; l’exercice perceptible d’une écrasante tutelle sur le Procureur de la République. Nous félicitons au passage le bureau de l’UNAMAB qui dans son communiqué a rappelé le gouvernement à l’ordre dans les termes ci-après : « l’UNAMAB tient à rappeler au gouvernement notamment au ministre de la justice, le principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs qui constitue le socle de l’état de droit et de la démocratie. (…..). L’UNAMAB prend à témoin la communauté nationale et internationale de l’option de vassalisation du pouvoir judiciaire faite par le gouvernement » fin de citation.

L’un des pères fondateurs de la démocratie moderne, Charles Louis de Secondat, baron de la Brède et de Montesquieu, en posant les préceptes axiologiques sur lesquels doit être assis un Etat de droit, a institué la séparation des pouvoirs ; mais plus encore, il a tenu à placer l’Homme comme une entité sacrée, inviolable, en affirmant que « une injustice faite à un seul est une menace faite à tous ! ».
Nous sommes indignés parce qu’en dépit de l’article 90 de notre Constitution qui dispose que « aucun député ne peut, pendant la durée des sessions, être poursuivi ou arrêté en matière criminelle ou correctionnelle qu’avec l’autorisation de l’Assemblée Nationale, sauf les cas de flagrants délits », il nous a pourtant été donné d’apprendre et de constater qu’en dépit de l’ordonnance du juge des libertés et de la détention, qui a décidé du refus de placement sous mandat de dépôt de l’élu du peuple, l’He Atao Hinnouho, des actes de violence physique et psychologique ont été perpétrés sur lui et sur son avocat. Il est à noter qu’en ce moment, l’honorable Hinnouho Atao est placé sous mandat de dépôt par la volonté du Roi Hérode ; au regard de la posture adoptée par le Garde des Sceaux et du rôle trouble que s’attèle à jouer le procureur de la République près le Tribunal de 1ère instance de Cotonou depuis l’ouverture de ce dossier, jusqu’à son évolution actuelle.
Du haut de cette tribune, nous voulons appeler et interpeler le Gouvernement ; nous voulons interpeler la conscience citoyenne de tous les élus parlementaires ; nous voulons interpeler le brave peuple du Bénin à l’effet d’espérer que du concours de nos contributions et des vôtres, l’Etat de droit sera rétabli et le député remis en liberté sans délai ; conformément à la constitution, à la loi et à la décision du juge.
Telle est la quintessence du message que nous voulons délivrer ce jour devant les élus de la Nation, pour la justice, pour la paix, pour la démocratie et le renforcement de l’Etat de droit dans notre pays.

Vive l’état de droit
Vive la démocratie
Vive la minorité parlementaire
Vive le BENIN
Je vous remercie
Fait à Porto-Novo, le 7 Mai 2018