Entretien avec le patriarche de Porto-Novo : «Le Bénin, un pays à l’abri des coups d’Etat», dixit Karim da Silva

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(«Le coup d’Etat, une hypothèse absurde pour le Bénin de la rupture, un modèle de démocratie et de développement en Afrique» dixit Karim Urbain da Silva, le patriarche )

Le Bénin ne serait-il pas menacé par un coup d’Etat, comme cela se produit dans d’autres pays de la sous-région ouest africaine? Le patriarche Karim da Silva, Président des Sages et Cadres de la ville de Porto-Novo, répond à cette préoccupation . Il affirme que cette hypothèse était absurde, car le contexte et les circonstances du Bénin ne s’y prêtent pas. Il  rappelle que les coups d’Etat du passé étaient motivés par la corruption, la confusion et la concussion, et qu’ils étaient toujours populaires. Il  raconte également son expérience personnelle avec Émile Zinsou, qui avait orchestré plusieurs coups d’Etat pour accéder au pouvoir. Nous avons rencontré le patriarche de Porto-Novo, Papa Karim da SILVA, avec lequel nous avons discuté des sujets d’actualité. A la question de savoir si comme un essaim qui se répand dans la sous-région ouest-africaine, le Bénin ne serait-il pas menacé par un coup d’Etat ?

Le patriarche Karim da Silva répond : « coup d’Etat ? Non ! Il ajoute qu’envisager une telle hypothèse relève de l’absurdité, parce que comparaison n’est pas raison, et que dans le cas du Bénin il faudra y réfléchir par deux fois, plutôt qu’une, car les temps ont changé et les circonstances ne sont pas les mêmes que celles qui ont prévalu chez ceux qui font actuellement des coups d’Etat.

«Un coup d’Etat serait aujourd’hui injustifiable et porteur de malédictions pour celui qui le ferait au Bénin de la rupture. Autrefois, le coup d’Etat intervenait, en moyenne, tous les deux ans, au Bénin, et il était toujours populaire. Le contexte qui nourrissait ces coups d’Etat était souvent sinon toujours, la corruption, la confusion et la concussion, en un mot, I ‘argent facile.

Jugez-en vous-mêmes, en 1967, Émile ZINSOU, membre le plus influent du gouvernement du Général SOGLO, le vrai, était allé chercher KOUANDETE pour renverser son gouvernement. Il avait mal appris son histoire, puisque son acte nous ramène au directoire lorsque Barras DUCOS ET SIEYES offrirent leur complaisance au coup d’Etat qui les renversait eux-mêmes, permettant à BONAPARTE de devenir le 1er Consul de France, précédant ainsi l’empire.

Mais là s’arrête la comparaison des situations historiques. Émile ZINSOU voulait, pour lui-même, ce pouvoir, pensait-il, tenu par des mains abhorrées, parce qu’entre d’autres mains que les siennes. Il était persuadé que KOUANDETE ferait de lui le bénéficiaire du putsch.

Tout paraissait évident. Mais, CARAMBA I Émile ZINSOU n’avait pas prévu dans son stratagème la réaction du Président de la Cour Suprême.

En effet, le coup réussit, il réussit totalement. C’est alors qu’lgnacio PINTO, Président de la Cour Suprême, donna de la voix. Il tonna si fort que ZINSOU Lolo dût laisser le métier en plan et abandonna le navire.

Comprenant et très rapidement le discrédit que comportait I ‘aventure d’avancer gaillardement à découvert, après la réaction d’Ignacio PINTO, Émile ZINSOU se désolidarisa publiquement des militaires, tout en leur demandant, en coulisses, de gérer la situation.

Or, ce faisant Émile ZINSOU n’avait pas dit son dernier mot. Et, il rebondira. Alphonse ALLEY qui avait hérité du pouvoir issu de ce coup d’Etat, s’était entiché d’Émile ZINSOU. Ce dernier l’avait convaincu d’écarter les trois anciens présidents des prochaines élections fixées au 5 mai 1968 et auxquelles devaient aboutir la gestion des affaires nationales que conduisit le Colonel Alphonse ALLEY.

Et alors réapparut dans le jeu qu’il n’avait en fait jamais quitté, Émile ZINSOU. J’étais arrivé deuxième de ces élections que le Dr ADJOU avait gagnées. Émile ZINSOU avait en plan de convaincre les jeunes cadres de l’armée, d’annuler le scrutin. Il vint donc me voir pour me persuader que la fraude massive avait eu raison de moi et qu’il était prèt à m’accompagner avec des preuves chez les jeunes cadres de I ‘armée présidés par KEREKOU, pour annuler l’élection. Ce que nous fîmes et le scrutin fut annulé.

C’est lorsque, quelques temps après, entre mai et juillet 1968, Émile ZINSOU vint me dire que les  militaires avaient décidé de lui confier le pouvoir, que je découvris le pot aux roses. Je lui répondis d’ailleurs instantanément : C’est moi le candidat aux élections et c’est toi qui deviens président ? ll avait réussi à m’avoir parce qu’il était de la famille. ll avait pour moi, rang d’oncle, étant le cousin germain de ma belle-mère, mère de ma petite soeur et de mon petit frère, que mon père avait épousée après le décès de ma mère.

D’autre part nous étions en si bons termes que je n’avais vraiment pas vu venir, au point où j’avais même consenti à lui vendre une portion de mon domaine au TF 220 que j’avais acheté, il y a peu, courant 1966.

Mais ce terrain était si grand, 117 ha, et si beau, qu’il était devenu l’objet de la convoitise d’Émile ZINSOU devenu Tout Puissant Président de la République. Mais ça, c’est une autre histoire, une affaire qui m’attirera les pires ennuis au point où je faillis y laisser ma vie.

Les derniers jours de son règne furent pour moi un calvaire. En fait, ce fut une véritable course contre la montre afin que ma vie soit sauvée, épargnée. En effet, KOUANDETE que je finis par rencontrer me débarrassa de lui et me sauva la vie. C’était le 10 décembre 1969.

Le directoire, un triumvirat militaire composé de De SOUZA, SINZOGAN et KOUANDETE, se forma pour s’emparer d’un pouvoir qui ne demandait qu’à être ramassé faute de candidat pour l’assumer, le prendre ou, le tenir.

En effet, je n’étais pas parti dans cette affaire pour prendre le pouvoir. J’avais craint pour ma vie et j’ai supprimé la menace.

En effet, Émile ZINSOU avait créé un tribunal d’exception qui ne serait pas forcément composé de magistrats. Ainsi, toute personne au terme du communiqué de Radio Cotonou ce 7 décembre 1969, pouvait être arrêtée, sur simple interpellation, jugée par ce tribunal d’exception, condamnée, exécutée le même jour et voir ses biens saisis.

En raison du litige domanial qui m’opposait à lui, différend sur lequel je ne cédais rien, malgré toutes ses manœuvres irrégulières et la puissance de son pouvoir, qui pesait sur les juges, au point de les contraindre à se parjurer, je me voyais obligé de me protéger de lui. La solution était donc que ce pouvoir, le sien, tombe, et plus tôt que plus tard.

D’autre part, ma parenté avec Émile ZINSOU, m’empêchait de prendre le pouvoir après lui et, de cette manière, sans créer d’éternels problèmes de famille. D’ailleurs, ma belle-mère, dès l’annonce du coup, ce 10 décembre 1969, avait commencé par dire haut et fort, tout en pleurant que c’est moi l’auteur et que je voulais tuer son frère.

D’autre part, KOUANDETE ne pouvait pas prendre ce pouvoir non plus, compte tenu de sa position dans l’armée. Ses supérieurs, qui n’étaient pas au courant, avaient tous été stupéfaits de constater qu’il avait renversé le président ZINSOU. En réalité, il n’avait donc fait que me délivrer.

Alors le directoire militaire se forma et, en cinq mois, il produisit le Conseil présidentiel. En effet, la prise du pouvoir par ce nouveau triumvirat, civil cette fois-ci, avait montré les limites de notre tissu social et politique, si bien qu’ils n’avaient pas trouvé mieux à faire, que d’imposer ce pouvoir à forme tournante, entre ces trois leaders politiques qui étaient, chacun, farouchement soutenu par les siens.

On se souvient encore du célèbre « Frappez, tuez, blessez, j’en prends la responsabilité » d’Hubert MAGA, au cours des élections de 1970 auxquelles avait d’ailleurs participé Émile ZINSOU, entre temps libéré et, quoique toujours nuisible, pour ma personne, était désormais devenu totalement inoffensif.

Or, avec le Conseil présidentiel étaient réapparues des travers d’autrefois. Les mauvaises habitudes de tous les régimes depuis 1960 avaient repris du service et dans une dimension plus folle. Ni plus, ni moins, un ministre de la république et, pas des moindres, le ministre des finances de notre pays, était devenu l’obligé d’un des fournisseurs de l’Etat. Ce fut la fameuse affaire KOVACKS.

Elle avait déferlé la chronique et entrainé des émois de grande indignation. Le pays vivait dans la confusion. Seul un coup d’Etat pouvait tout remettre à plat et mettre fin à cette situation. Et d’ailleurs, il se produisit, le 23 février 1972, mais les acteurs ratèrent le coach, car des erreurs incroyables conduisirent leur entreprise à l’échec.

Cependant, loin de céder au découragement, d’autres cercles s’organisèrent. C’est ainsi que j’avais, avec quelques amis, dont les officiers ALLEY et KEREKOU, l’ambassadeur de GUINEE et d’autres, organisé un coup d’Etat qui sera déclenché le 26 octobre 1972.

Et, comme dans toute aventure de ce genre, l’imprévu se manifestera. Les militaires de OUIDAH s’opposèrent au dernier moment, au choix du Colonel ALLEY qui était pourtant leur supérieur. Ils imposèrent KEREKOU, leur homme de confiance, pensant qu’ils pourraient le manœuvrer à volonté.

C’est ainsi que KEREKOU fera la déclaration à la radio et sera récupéré et soutenu par des jeunes cadres dahoméens qui avaient à leur tête Simon Ifèdé OGOUMA.

ALLEY désormais hors-jeu et même en prison, cette alliance de la jeunesse marxiste à l’époque et de l’armée, nous conduira directement dans le mur dont viendra nous relever la Conférence nationale des forces vives de la nation.

Et, plus jamais il n’y eut de coup d’Etat à part celui que SOGLO, l’autre, voulut se faire à lui-même, après avoir échoué, à obtenir sa réélection en 1996. Mais là, c’était un simple péché d’orgueil, serait- on tenté de dire, sauf que personne n’a jamais compris, jusqu’aujourd’hui, ce qu’il avait fait de si grave pour demander, à cor et à cri, une amnistie.

Que donc faut-il tirer comme enseignement de cette histoire ? C’est que le coup d’Etat n’intervient en général que lorsqu’un Président de la République ne fait pas son travail et s’occupe à se complaire. dans des malversations.

De tous les régimes que nous avons connu dans ce pays, celui du Président Patrice TALON est le seul qui dit, et fait ce qu’il dit. La rupture est le seul régime qui s’occupe à promouvoir tous les secteurs de notre économie.

La face de notre pays a changé, extraordinairement. Personne ne savait, que ce qui a été réalisé est possible, au point où personne ne peut venir après lui nous raconter des histoires, au lieu de faire son travail.

Les béninois, peu enclins à la discipline, ont intégré, à leur compréhension et à leur quotidien, la rigueur que le Président Patrice TALON leur a inculqué. Qui ne sait pas qu’il travaille, notre président ?

Il y a en ce moment des temps difficiles que traverse notre pays. Plusieurs s’étonnent de voir que le Président de la République, son Excellence Monsieur Patrice TALON, est attaché à la démocratie et veut que le peuple frère du NIGER continue de vivre sous le régime de la démocratie.

Les mêmes qui se prennent pour des démocrates chevronnés oublient leurs sacrosaints principes pour vilipender sa fermeté, contre le pouvoir arbitraire et spontané des putschistes opportunistes du NIGER, qui ont renversé un pouvoir qui s’appelait quand même la démocratie et dont le président est un élu du peuple nigérien.

Y aurait-il deux poids et deux mesures ?

Nous devons nous ressaisir et apporter notre soutien total à l’action du Président de la République. Lorsque la nation connaît des heures troubles ou des moments difficiles, tout peuple se rassemble autour de son chef. Nous nous déshonorerons d’y faire exception. Les diverses accusations aussi fausses que fantaisistes qui circulent sur les réseaux sociaux, doivent cesser, le temps n’est pas à la distraction et à l’éparpillement. Notre véritable situation est que notre pays est en crise et qu’il y a lieu d’abord et surtout de resserrer les rangs et de se rassembler autour du Président de la République.

Nous devons donc taire nos différends pour soutenir, tous ensemble, notre Président.

La raison d’Etat ne capitule jamais !

KARIM DA SILVA