La Cour «rejette purement et simplement» la demande de Soglo

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Depuis le 03 septembre 2013, le Maire de la municipalité de Cotonou, Nicéphore Soglo, est situé sur son recours en inconstitutionnalité formulé contre son autorité de tutelle, le Préfet des Départements de l’Atlantique et du Littoral, Placide Azandé, concernant son arrêté préfectoral portant création d’une commission départementale chargée d’identifier, de répertorier et de contrôler les parcelles disponibles et les réserves administratives issues des opérations de lotissement dans certaines communes des deux départements. La Haute Juridiction l’a purement et simplement débouté et a profité de cette occasion pour lui dire ses quatre vérités au sujet de sa gestion.

Dans son recours, Nicéphore Soglo a exposé que «depuis un certain temps, le Préfet sur instructions du ministre de la décentralisation, de la gouvernance locale, de l’administration et de l’aménagement du territoire, s’immisce de plus en plus dans les affaires relevant des attributions des communes au mépris des dispositions de la Constitution, des lois et règlements qui organisent les fonctions du Maire ainsi que les attributions des communes. C’est le cas de l’arrêté querellé». Loin, il a développé que «tous ces agissements sont contraires à la législation en matière de décentralisation».

En réponse à la mesure d’instruction de la Cour, l’autorité préfectorale a apporté ses clarifications. «… Le diagnostic présenté lors du forum sur la décentralisation et la déconcentration tenu à Cotonou du 26 au 28 novembre 2007 n’est guère reluisant et fait état, entre autres limites et insuffisances en matière de décentralisation, de la mauvaise gouvernance foncière liée, entre autres, au manque de transparence dans la gestion de certains maires. Plus singulièrement, les lotissements connaissent aujourd’hui de sérieux dysfonctionnements engendrant une viabilisation inadéquate du cadre de vie des citoyens et une recrudescence de l’insécurité foncière tant en milieu rural qu’en milieu urbain», révèle Placide Azandé dans sa part de vérité à la Cour. «La course effrénée des élus locaux vers les parcelles disponibles fait qu’on dénombre un nombre non moins important dans un lotissement alors même que paradoxalement certains présumés propriétaires de parcelles ne retrouvent plus leurs parcelles et sont donc privés de leur droit… Ces parcelles disponibles sont vendues par certains élus locaux… Les réserves administratives communales sont morcelées alors même qu’elles ne sont pas déclassées.

De même, sous le prétexte de dédommagement de sinistrés, des parcelles issues des morcellements sont vendues anarchiquement, sacrifiant ainsi, non seulement les présumés propriétaires mais aussi et surtout malheureusement les générations futures», a-t-il souligné.
«Dans les Départements de l’Atlantique et du Littoral, des associations de la société civile sont même allées confectionner des plaques qu’elles ont tenté de placer sur des parcelles disponibles et sur des réserves administratives, n’eût été mon interdiction, dénonçant et interdisant ainsi les morcellements desdites réserves et la vente anarchique des parcelles disponibles. Pour ce qui concerne la municipalité de Cotonou, même certaines rues sont sujettes à ces irrégularités. Une dizaine de conseillers municipaux m’ont saisi à l’effet de dénoncer, entre autres, la gestion des parcelles disponibles et des réserves administratives. Les nombreuses plaintes formulées contre la mairie de Cotonou par nos concitoyens dans ce sens sont les preuves tangibles et irréfutables de la gravité du malaise foncier», a-t-il dévoilé aux sages de la Cour, avant de faire observer que «le dédommagement de sinistrés n’est qu’un prétexte pour vendre les parcelles issues des morcellements». Pour lui, «l’arrêté incriminé ne soufre d’aucune irrégularité».

Sur la recevabilité du recours du maire de Cotonou, Placide Azandé a développé que «la Cour Constitutionnelle est la plus Haute Juridiction en matière constitutionnelle. Elle est juge de la constitutionnalité de la loi et elle garantit les droits fondamentaux de la personne humaine et les libertés publiques…» Or, poursuit-il, «l’arrêté attaqué porte sur la création d’une Commission départementale chargée d’identifier, de répertorier et de contrôler les parcelles disponibles et les réserves administratives issues des opérations de lotissement dans certaines communes des départements de l’Atlantique et du Littoral.

Il est précisé donc que la Commission créée par l’arrêté querellé identifiera et contrôlera les parcelles disponibles et les réserves administratives issues des opérations de lotissement dont l’application relève de la légalité. De jurisprudence constante, la Cour Constitutionnelle est juge de la constitutionnalité et non de la légalité. Elle ne saurait donc connaître du recours en inconstitutionnalité du maire de Cotonou. La Cour Constitutionnelle doit se déclarer incompétente». «Il est déplorable que de plus en plus, le Maire de Cotonou comme d’autres, assimile leur fonction à une fonction privée qui exclut le responsable de l’entreprise à tout devoir d’obéissance à l’autorité hiérarchique», a-t-il précisé.

La Cour condamne Soglo et donne raison à Azandé

En la forme, la Cour s’est «déclarée incompétente et rejette purement et simplement» la demande de Nicéphore Soglo. Au fond, elle a fait constater que «le préfet encore moins le ministre chargé de la décentralisation, n’a jamais assimilé l’autorité de tutelle à un rapport de subordination administrative du maire au ministre et au préfet». Elle a aussi fait constater que «ni le ministre, ni le Préfet n’a violé le bloc de constitutionnalité».

La Cour a estimé que l’arrêté portant suspension de morcellement et de vente des réserves administratives a été pris en exécution de la décision du conseil des ministres. Pour elle, le défaut de mise en application de l’arrêté N°42/337/Dep-Atl-Lit/Sg/Sp-Cp par le maire est une violation de l’article 68 de la loi N°97-029. La Cour a également fait savoir que «le recours en inconstitutionnalité introduit par le maire vise à obtenir de la haute juridiction une décision qui servirait de couverture juridique d’une part, aux tendances de désobéissance à l’autorité de tutelle voire, hiérarchique et d’autre part, à la velléité de gestion solitaire et autoritaire du patrimoine communal…»

Au regard de tout ce qui précède, la Cour s’est déclarée incompétente pour connaître du recours de Soglo qui ressort plutôt du domaine de la légalité et non de la constitutionnalité.