Côte d'Ivoire : Guillaume Soro annonce mettre «fin» à son exil

Afrique

(Voici la part de vérité de Guillaume Kigbafori Soro suite à la tentative de kidnapping à l’aéroport international d’Istanbul)

Condamné à la perpétuité en Côte d’Ivoire à l’issue d’un procès qu’il juge politiquement motivé, l’ex-Premier ministre Guillaume Soro annonce mettre « fin » à son exil, en cours depuis décembre 2019. Reste encore à savoir s’il risque d’être arrêté à son retour en Côte d’Ivoire.

« J’annonce, ici et maintenant, que je mets fin à mon exil, car il m’est pénible de vivre loin de ma terre ancestrale et natale d’Afrique ». Dans une courte vidéo de cinq minutes publiée sur ses réseaux sociaux, Guillaume Soro évoque la « fin » de son exil, sans définir les contours de cette annonce.

Rentrera-t-il en Côte d’Ivoire, où il est sous le coup de deux condamnations judiciaires ? Quelques minutes après son allocution, son directeur de campagne, Moussa Touré, indique « qu’il restera en Afrique pour faire face à son destin », laissant entendre ainsi qu’il pourrait être domicilié dans un autre pays de la sous-région.

Dans cette vidéo, Guillaume Soro accuse le président ivoirien Alassane Ouattara de vouloir le traquer partout où il se trouve. « La dernière tentative d’arrestation opérée à Istanbul, démontre, si besoin l’était, que le seul lieu de repos paisible que Monsieur Ouattara me réserve est bien le cimetière », a affirmé l’ancien Premier ministre.

« Je refuse d’être un fugitif »

En plus de revenir sur son exil mouvementé en France, en Belgique, à Dubaï et « jusqu’aux confins du continent asiatique », dit-il, Guillaume Soro réaffirme son innocence alors que les juges ivoiriens l’ont condamné pour « atteinte à la sûreté de l’État » en 2021 et « recel de détournement de deniers publics » en 2020.

« Je refuse d’être un fugitif. D’autant plus que devant Dieu et les hommes, je ne suis coupable d’aucun forfait qui mériterait un tel châtiment ».

Son parcours d’exilé

Pour échapper à la prison, Guillaume Soro a pris la clé des champs. Il a quitté Abidjan et mène une vie de fugitif qui le conduit d’un pays à un autre. Selon le parcours détaillé par l’opposant exilé, il a notamment tourné en Europe et en Asie.

Au départ, Guillaume Soro avait trouvé refuge en France. Mais ses ennuis vont très vite commencer. Il affirme qu’en novembre 2020, le président Alassane Ouattara aurait exigé son arrestation et son extradition. Menacé, le président de Générations et Peuples Solidaires (GPS) s’est retrouvé par la suite en territoire belge. Mais là encore, ce n’était pas le bout du tunnel.

Comme ce fût le cas avec la France, le pouvoir d’Abidjan aurait réclamé l’arrestation et l’extradition de Guillaume Soro en Côte d’Ivoire. Selon l’opposant, il a été même demandé aux autorités belges de ne pas lui délivrer des documents administratifs qui lui permettraient de vivre légalement dans le pays.

L’option de la Belgique a donc échoué. Guillaume Soro a été contraint de changer de plan et d’itinéraire. Il va alors prendre le chemin du continent asiatique, mais la situation va encore se compliquer. « En janvier 2022, je me suis installé à Dubaï. Le 23 décembre de la même année, recevant les lettres de créance de l’ambassadeur des Émirats Arabes Unis, il en a profité pour réclamer mon arrestation et mon extradition en Côte d’Ivoire. Ceci ne se discute pas non plus », a-t-il affirmé.

Informé de l’agissement du chef du gouvernement ivoirien, Guillaume Soro s’est encore déplacé. « J’ai dû me résoudre, la mort dans l’âme, à nouveau, à prendre le pénible chemin de l’exil, m’enfonçant toujours plus loin dans les confins du continent asiatique », a confié l’ancien rebelle.

La tentative d’arrestation à Istanbul

Il y a quelques jours, les proches de Guillaume Soro ont alerté sur une tentative d’arrestation qui ciblait leur leader charismatique. Selon leurs dires, un commando aurait été dépêché à Istanbul (Turquie) pour mettre la main sur Guillaume Soro.

C’est d’ailleurs cet épisode qui a sorti l’opposant de son mutisme. Guillaume Soro n’a pas indiqué sa position actuelle, mais il semble fatigué et étouffé par cette course effrénée.

Guillaume Soro lourdement condamné au pays

Pour rappel, le président de Générations et Peuples Solidaires (GPS) a été condamné par contumace dans deux dossiers différents. Dans un premier temps, il a écopé de 20 ans de prison pour recel de détournement de deniers publics et blanchiment d’argent. Secondo, Guillaume Soro a été reconnu coupable et condamné à la prison à perpétuité pour « atteinte à la sûreté de l’État ».

Il avait rejeté les accusations dans le cadre de ses deux dossiers. L’ancien premier ministre avait dénoncé un acharnement politique contre sa personne à travers les poursuites judiciaires.

Déclaration de M. Guillaume Kigbafori Soro suite à la tentative de kidnapping à l’aéroport international d’Istanbul

Mesdames et Messieurs,

Mes Chers Compatriotes,
Me voici donc devant vous, grâce à la magie de la technologie. Et rassurez-vous, je me porte bien.

Vous l’avez appris.

M. Ouattara a tenté de m’arrêter à l’aéroport d’Istanbul et de m’extrader, par la procédure d’urgence, en Côte d’Ivoire le 03 novembre dernier. Ceci n’est pas discutable.

Depuis ces cinq longues années, son obsession forcenée à me mettre aux arrêts ne s’est jamais flétrie. Pis, elle s’est aggravée.

Après m’avoir fait condamner par une justice émasculée et aux ordres, successivement à 20 ans et à perpétuité, il a entrepris de déclencher contre moi une féroce chasse internationale à l’homme, en dépit des décisions de la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, qui a annulé toutes les poursuites contre moi, parce qu’elles étaient, vous le savez bien, politiquement motivées. Sachez-le : dans cette affaire, il ne s’est jamais agi de justice. Mais plutôt de perfidie.

En effet, déjà dans le courant de l’année 2020, précisément au mois de novembre, il a exigé de la France où je résidais mon arrestation et mon extradition. Paris, comme vous le savez, a décidé de m’interdire son territoire.

Du 14 au 18 février 2022, Alassane Ouattara a effectué une visite officielle en Belgique avec, parmi ses priorités, l’obtention de mon arrestation. Il a expressément exigé que le visa Schengen que je détenais ne soit pas renouvelé. Il a insisté auprès du gouvernement belge pour que ce pays ne me délivre aucun document administratif qui m’aurait permis d’y résider légalement. Ceci aussi est incontestable.

Ceci m’a contraint à emprunter une autre destination pour mon exil.

En janvier 2022, je me suis installé à Dubaï. Le 23 décembre de la même année, recevant les lettres de créance de l’ambassadeur des Émirats Arabes Unis, il en a profité pour réclamer mon arrestation et mon extradition en Côte d’Ivoire. Ceci ne se discute pas non plus.

Informé, j’ai dû me résoudre, la mort dans l’âme, à nouveau, à prendre le pénible chemin de l’exil, m’enfonçant toujours plus loin dans les confins du continent asiatique.

Chers Compatriotes,

La dernière tentative d’arrestation opérée à Istanbul démontre, si besoin en était, que le seul lieu de repos paisible que me souhaite M. Ouattara est bien le cimetière. Est-ce le lieu auquel on destine son bienfaiteur, celui qu’on affublait du « c’est mon fils »?

 

Non.

Je revendique le droit légitime à la vie.

Et je n’irai pas plus loin dans mon exil.
Je refuse d’être un fugitif, d’autant plus que, devant Dieu et les hommes, je ne suis coupable d’aucun forfait qui mériterait un tel châtiment.

C’est pourquoi, ici et maintenant, j’annonce qu’à partir d’aujourd’hui, je mets fin à mon exil.

Car il m’est pénible de vivre loin de ma terre ancestrale et natale d’Afrique,
Car je veux vivre dans la quiétude avec ma famille, mes proches et ceux que je chéris le plus.
Car je veux pouvoir contribuer à la réconciliation des fils et des filles de mon pays et apporter ma pierre à l’édification de la paix et de la concorde entre les peuples d’Afrique.

Vive la Côte d’Ivoire.

Je vous remercie.

Guillaume Kigbafori SORO
− Ancien Premier ministre (2007-2012)
− Ancien président de l’Assemblée nationale ( 2012-2019)