Des zones d’ombre de la commission d’enquête embrouillent l’opinion

Economie & Tech

Initié et mis en exécution de 2002 à 2012, le Projet d’Aménagement des Massifs Forestiers (PAMF), a fait objet de débats très houleux mardi 10 juin dernier à l’Assemblée Nationale. Et pour cause. Les conclusions de la Commission d’Enquête d’Informations et de contrôle ont relevé de graves défaillances, liées à une supposée gestion calamiteuse dudit projet. Des observations qui, au regard de la chaîne de suivi et de contrôle, prévue et effectivement mise en œuvre pour le bon fonctionnement de ce projet, laisse planer des doutes dans les esprits quant à l’objectivité des conclusions trop hâtives des membres de la commission.

D’un coût global de 13.702.000.000 Fcfa, le Projet d’Aménagement des Massifs Forestiers a été initié pour préserver et instaurer une gestion durable des écosystèmes naturels du pays sur une superficie de 1.000.000 d’hectares dont 370.000 ha de forêts classées. Prenant en compte les régions ouest du centre du Bénin, c’est-à-dire dans les départements des collines, de la Donga et du Borgou, le PAMF a été une solution proposée par le Gouvernement de l’ex Président de la République du Bénin, le général Kérékou pour gérer les ressources naturelles, réaliser des activités de développement rural telles que la pisciculture, l’apiculture, l’aménagement des bas-fonds ; avec par ricochet, l’appui aux actions de développement et aux actions d’accompagnement et des infrastructures indispensables.
Piloté par une cellule de gestion sous tutelle du Ministère de l’Agriculture, de l’Elevage et de la pêche d’alors. Pour mémoire, il faut rappeler qu’à l’époque, c’était le ministre Sèhouéto Lazare qui aujourd’hui fait partie des députés qui dénoncent à gorge déployée à l’Assemblée nationale, la gestion hasardeuse du projet PAMF, qui en était l’autorité de tutelle. Et c’est l’une des curiosités de ce dossier qui donnent le sentiment à plus d’un que, c’est le voleur qui crie au voleur.
Aux dires donc des députés, le projet, après les dix (10) années d’exécution, a été révélé très mal géré, selon le rapport de la Commission parlementaire d’enquête, d’informations et de contrôle.
C’est pour cette raison qu’à l’issue des débats mardi dernier, en présence du ministre de l’environnement et des directeurs sous-tutelle, ils ont formulé quelques recommandations à l’endroit du Gouvernement pour sauver les acquis de ce projet.
Il s’agit entres autres, de procéder à l’approbation des deux plans d’aménagement par le Conseil des ministres ; éviter le délai trop long entre la phase de conception des projets et sa mise en œuvre ; prendre des dispositions pour éviter le fractionnement des marchés. Aussi, d’autres mesures devront être prises pour faire exécuter ou rembourser les entreprises qui auraient perçu plus qu’il n’en faut, la responsabilisation d’un cadre afin d’assurer la pérennisation des acquis du projet.
Alors qu’ils avaient la latitude de mieux éclairer l’opinion en toute objectivité sur ce dossier, les membres de la commission parlementaire d’enquête, d’information et de contrôle ont donné le sentiment d’être passés à côté de la plaque. Ce qui ne permet pas à l’opinion publique de mieux cerner quels sont réellement les vrais acteurs impliqués dans cette prétendue mauvaise gestion d’un projet, qui n’est pas si désastreux comme le laissent croire les débats de mardi dernier. Même les conclusions du rapport d’enquête parlementaire ne sont pas aussi si péremptoires.

Devoir de clarification

En réalité, il est nécessaire de faire des clarifications au regard de certaines interrogations qui foisonnent dans les esprits de beaucoup de Béninois. Ceux-ci se posent de multiples questions sur les motivations réelles des députés à réchauffer ce dossier et de le traiter de manière tendancieuse, de sorte à faire croire qu’il s’agit d’un nouveau scandale sous le régime du docteur Boni YAYI, comme d’ailleurs ses détracteurs en ont l’habitude.
En vérité, lorsque les députés parlent de mauvaise gestion dans ce dossier, à qui en imputent-ils la responsabilité ?
Au cours de la période d’exécution du projet PAMF, deux différents directeurs en ont coordonné les activités. La commission parlementaire devrait préciser la période du mandat au cours duquel la mauvaise gestion a été révélée ?
Mieux, selon le mécanisme de suivi et de contrôle de ce projet, un cabinet d’ingénieur conseil avait été recruté par la Banque et est resté au niveau du projet jusqu’à la fin. Et ainsi par exemple, tout décaissement de fonds est subordonné à un rapport d’étape que le cabinet d’ingénieurs adresse à la coordination du projet qui à son tour, saisit la Caisse Autonome d’Amortissement (CAA). Cette dernière, après étude et validation, le retourne au projet qui saisit cette fois-ci la Banque. Si elle valide le dossier de décompte, elle vire directement les fonds dans le compte de l’entrepreneur.
Et dans ce méli-mélo de vérifications, comment peut-on comprendre que des investigations n’aient pas été menées auprès des partenaires pour mieux cerner, certains détails liés à la gestion dudit projet? Ils auraient pu comprendre que les différents directeurs de ce projet, ne manipulant pas eux-mêmes les ressources du projet, il leur sera difficile de demander des comptes aux différents entrepreneurs indélicats qui ont profité de cette défaillance pour semer le bordel.
Mieux, dans le rang des donneurs de leçons d’aujourd’hui, le député Lazare Sèhouéto, alors ministre de tutelle de la commission qui a géré ce projet, ne serait-il pas l’un des acteurs principaux de cette mauvaise gestion ? Finalement, quel but poursuit cette commission qui, au lieu de statuer sur d’autres dossiers du Gouvernement actuel dans une vision de développement, préfère faire surgir un dossier qui date de 14 années ?
Tout compte fait, les dés sont jetés, et les vrais acteurs impliqués dans ce dossier sont ceux qui devront répondre de leurs actes. Et ceci, avec interpellation de toute la chaîne de suivi et de contrôle dans la mise en exécution du Projet d’Aménagement des Massifs Forestiers ‘’Pamf’’. (A suivre)