Ce que Marcel de Souza a dit de Yayi et les Fcbe

Politique

C’est un discours acerbe que Marcel de Souza a servi aux militants du Frap et des invités hier dimanche matin à l’ouverture du 2è congrès ordinaire du Front républicain pour une alternative patriotique (Frap). Ministre de la République sous Boni Yayi et actuellement député à l’Assemblée Nationale, grâce à la liste Fcbe dont le leader charismatique n’est que Boni Yayi ; il s’est prononcé sur le bilan des relations de son parti avec Boni Yayi.

Dans le discours qu’il a prononcé, (voir ci-dessous) il s’est affreusement attaqué à la gouvernance politique, économique et sociale du régime dont il a servi avec abnégation et dévouement. Pour lui, les actes posés par le pouvoir en place sont flous. Le discours de Marcel de Souza contraste bien avec son séjour au gouvernement. Lire l’extrait de son discours.

Extrait discours de Marcel de Souza

« …Aujourd’hui, nous notons que le Frap doit organiser son congrès pour que nous puissions retrouver nos repères. Notre jeune parti a donné le meilleur de lui-même pour défendre les actions et le Projet de société du Président Boni Yayi avec le retentissant KO de 2011. Le Frap s’associe solennellement aux autres partis de la mouvance pour assurer sa part de responsabilité pour toutes les actions positives et même les difficultés et les insuffisances, les défis qui restent à relever. Aujourd’hui, nous devons remercier le Président Thomas Boni Yayi qui, à chaque remaniement a toujours nommé un membre du parti Frap dans son gouvernement. Aujourd’hui, le Frap ne veut aller dire que nous nous opposons à tout ce qui s’est passé. Au contraire, moi personnellement, je dis que nous devons assumer. Nous devons assumer les résultats auxquels nous avons aboutis car ce ne serait pas responsable de notre part de dire aujourd’hui, voilà, il y a telle insuffisance, il y a telle faiblesse… nous n’en sommes pas responsables. Nous ne sommes pas de la trempe de ces gens-là.

Beaucoup d’efforts ont été fournis sur divers axes…Mais force est de constater qu’aujourd’hui, nous n’avons pas atteint les résultats que nous avons escomptés. La pauvreté s’est étendue et gagne du terrain. La pauvreté qui était notre ennemi, notre véritable gangrène devrait être combattue coûte que coûte. Mais nous notons qu’en 2006 à l’accession au pouvoir du Président Boni Yayi, ceux qui avaient un pouvoir monétaire de 10.000 F Cfa par mois, donc dans l’extrême précarité, représentaient 37 %. Avec les efforts qui ont été fournis, ce taux est passé à 35,2 % en 2011. Tous les espoirs étaient permis. Mais lorsque nous avons fini une enquête au niveau de l’Institut national de la statistique et de l’analyse économique (Insae) c’est-à-dire l’Enquête sur les conditions de vie des Béninois (Emicov), notre surprise a été que ceux qui sont concernés par l’extrême pauvreté sont passés à 40,3 %. Quelle a été notre déception ! Cela veut dire que nous n’avons pas atteint l’objectif qui consiste à faire reculer la pauvreté et à engager la croissance économique pour le bien-être des populations. C’est une conclusion que nous devons pouvoir tirer de façon honnête. Mais comment sommes-nous arriver à ce résultat ? N’est-ce pas le chômage des jeunes ? N’est-ce pas le secteur informel qui s’est élargi ? N’est-ce pas le règne de l’impunité ? N’est-ce pas la malgouvernance ? N’est-ce pas la faute nos collègues, ceux que j’appelle les grés à gré qui aiment fouler aux pieds l’orthodoxie financière et qui souvent sont là en train de passer des marchés de plusieurs milliards de F Cfa dans les conditions floues ? Nous en avons pour preuve cette affaire Ppea II pour laquelle j’ai personnellement participé à l’élaboration des stratégies, pour laquelle nous avons mobilisé les ressources, pour laquelle nous avons remis ces ressources à la disposition du ministère sectoriel. Nous avons été très surpris après que certains qui étaient dans le même gouvernement que nous ont payé nos syndicats pour aller dire que notre responsabilité est engagée dans le détournement des fonds. Heureusement pour nous, le cabinet Kroll est venu et a fait un travail remarquable. Il a déposé un rapport que nous apprécions à sa juste valeur. Ce rapport a démontré que le ministre du développement que je suis n’a rien à avoir dans la dilapidation des ressources mobilisées pour donner de l’eau à la population…N’est-ce pas les adeptes du gré à gré pour lesquels il y a eu des factures de plusieurs milliards de F Cfa qui sont payées en moins de 24 heures alors que le citoyen lambda qui participe au marché public attend huit mois voire un an avant d’être payé ? Nous avons des contraintes que nous devons avoir le courage de regarder en face et de regarder de très près pour aller à l’amélioration des conditions de vie des Béninois et surtout pour notre responsabilité.

Notre système éducatif forme à 90 % à l’enseignement général jusqu’à ce jour. Cela veut dire que le système éducatif forme pour le chômage alors que nous aurions souhaité que ce système éducatif forme pour l’enseignement technique, l’enseignement professionnel et surtout entrepreneurial pour aller vers l’auto-emploi. Nous avons eu un forum qui a eu lieu fin décembre 2014 qui a abouti à des conclusions qui ont péché dans leur mise en œuvre. Pour notre système éducatif, nous avons besoin aujourd’hui encore de 11.000 salles de classes et de 12.000 enseignants. Voilà pourquoi les résultats ne sont pas toujours au rendez-vous en matière d’enseignement. Il s’agit de reformater notre système éducatif pour mettre à la disposition du marché les besoins idoines.
Lorsque nous parlons de notre agriculture, nous avons eu à initier le plan de relance du secteur agricole. Les résultats sont mitigés car tout n’est pas mis en œuvre. La mécanisation traine encore. L’aménagement hydro-agricole pour la vallée de l’Ouémé vient de débuter. Les résultats ne sont pas encore là. Le financement bancaire de l’agriculture n’est pas encore une réalité. La diversification agricole n’est pas aussi effective car on continue de parler toujours du coton et du coton…

Depuis l’indépendance, la fourniture en énergie électrique n’a pas particulièrement retenu l’attention de nos dirigeants. Nous sommes encore à 4 heures de délestages par jour…Beaucoup de projets sont en cours, mais en réalité, nous devons attendre deux à quatre ans pour avoir de l’électricité en qualité et à moindre frais. En tout cas, pour le moment, l’électricité coûte deux fois plus cher au Bénin que dans les pays voisins…Ce sont là des éléments qui nous interpellent tous…
Je tiens à rendre hommage à Boni Yayi pour sa combativité au départ de son mandat. Il n’était pas venu pour pouvoir dire qu’il veut faire enrichir tel ou tel. Il n’était pas venu pour pouvoir entrainer le pays dans la ruse. Mais chemin faisant, il était devenu professeur de rang magistral en matière politique voire en matière de drible…C’est vrai qu’en politique il n’y a pas de vertu, mais toute raison gardée, est-ce que c’est normal que les jeunes puissent appeler notre Chef de l’Etat le Maradona national ? Je pense qu’il est temps qu’on puisse se ressaisir, que les Forces cauris pour un Bénin émergent puissent faire un réarmement moral pour que nous puissions aller vers un nouveau départ. Il y a eu des usurpateurs. C’est vrai ! Ils viennent s’accaparer de ce que nous avons tous lancé ensemble. C’est également vrai ! Mais faut-il les laisser faire ? Faut-il laisser les grés à gré continuer à agir de cette façon ? Nous devons nous battre. Nous avons essentiellement trois contraintes auxquelles nous devons faire face. La première, c’est d’abord avoir une administration de développement. Notre administration est désagrégée (…) Il y a beaucoup de gens qui voient le soleil se lever à leur porte et qui se disent qu’ils ont reçu le message pour diriger le Bénin, ils veulent être présidents de la République. Ont-ils les potentialités et les capacités requises pour faire face aux défis de la pauvreté et redresser notre administration afin que les projets et autres puissent être bien exécutés ? Cela nous interpelle tous. La 2è contrainte que j’ai notée est la malgouvernance, l’impunité, la corruption et surtout les grés à gré. Les spécialistes de gré à gré encombrent l’espace. De gros marchés sont donnés sans aucune orthodoxie…Au Bénin, la corruption est devenue une gangrène. Si vous prenez les routes, on note que les prébendes qui sont prélevées sur 100 Km sont deux fois plus élevées au Bénin que dans les pays voisins. A peine le Nigeria nous dépasse. Nous sommes dans le peloton de tête en matière de corruption pour la réalisation des infrastructures routières…La 3è contrainte que j’ai notée est liée aux poussées démographiques. Aucune stratégie de développement ne peut résister à la frénésie démographique qu’on observe au Bénin (3,25 à 3,50 % de taux de naissance).
Prenez garde ! Lorsque vous vous engagez dans la lutte contre la corruption, on vous dira que vous avez reçu 500 millions des hommes d’affaires, on va fouiller vos comptes, on va se mettre à fouiller les sociétés qui portent le nom de De Souza. Mieux on a avancé même que des armes ont été commandées par des sociétés écrans créées par des de Souza. Qu’est-ce qui se passe ? Je voudrais rappeler que les de Souza sont des éléphants et vaine est la haine de l’hyène contre un éléphant. L’éléphant avance et sans coup férir avancera toujours.
Je n’ai rien contre les hommes d’affaires qui s’annoncent pour la présidentielle de 2016. Ils sont Béninois et ils ont le droit de se présenter. Mais ils doivent avoir l’esprit partisan, l’esprit pour la lutte contre la pauvreté. Il faut régler le problème de manière durable. Nous invitons donc nos compatriotes, lorsque se produira le choc des titans à coup de milliards de F Cfa, qu’ils puissent en profiter, mais dans le secret des urnes qu’ils réfléchissent et savoir faire le bon choix pour la postérité…
Le réarmement moral dont nous parlons tant en ce qui concerne les valeurs citoyennes que le comportement républicain s’impose aujourd’hui plus qu’hier. Nous avons perdu nos repères au niveau de la morale, au niveau du respect minimum des textes. Il faudrait que nous puissions revenir à ce réarmement moral par des instructions civiques qui vont être dispensées dans nos collèges et nos partis… Le désespoir conduit à la dérive. L’espoir doit renaitre et transformer chaque Béninois et chaque Béninoise pour un Bénin triomphant ».