Badara Gadiaga a été placé en garde à vue « pour discours contraire aux bonnes mœurs » après s’être exprimé au cours d’un débat télévisé sur le procès qui a opposé Ousmane Sonko, alors opposant, à la masseuse Adji Sarr qui l’accusait de viol.
À l’origine de l’interpellation du chroniqueur télévisé, une séquence vidéo massivement relayée sur les réseaux sociaux et extrait d’une émission de débat très suivie qui a eu lieu vendredi dernier. On y voit Badara Gadiaga répondre au député du Pastef Amadou Ba qui vient de l’accuser de falsification de diplôme, que le Pastef n’a pas de leçons de morale à donner, vu que leur chef de parti a été condamné pour « corruption de la jeunesse » . Une référence directe au procès qui a opposé Ousmane Sonko, alors qu’il était encore opposant, à Adji Sarr, ancienne employée d’un salon de massage qui l’accusait de « viols répétés ».
Après plusieurs heures d’audition par la division spéciale de la cybersécurité, Badara Gadiaga a finalement été placé en garde à vue mercredi 9 juillet dans la soirée. Depuis, les messages de soutien et les critiques de l’ensemble des acteurs de l’opposition se multiplient. Ils accusent les autorités de vouloir « étouffer le débat public » ou encore de dévier le regard des citoyens des vrais problèmes que sont l’état des finances publiques et la vie chère. Plusieurs organisations de défense des droits de l’homme s’inquiètent de cette nouvelle interpellation d’un acteur politique et dénoncent « une menace sur la liberté d’expression » au Sénégal.
Pour l’avocat de Badara Gadiaga aussi, cette accusation de « discours contraire aux bonnes mœurs » est exagérée. « Dans ses déclarations, et de ce qui est ressorti de l’enquête, c’est juste qu’il a retranscrit ou traduit en wolof les passages du jugement qui est toujours dans l’ordonnancement juridique. C’est ce qui est incompréhensible dans cette procédure. Il s’agit de liberté d’expression, garantie par la Constitution et sur laquelle on ne doit pas transiger », estime Me Souleymane Soumaré.
En quelques heures, le choix de la division spéciale de la cybersécurité de placer Badara Gadiaga en garde à vue a fait du chroniqueur connu pour son ton irrévérencieux une personnalité politique centrale du débat public. Il devra être présenté ce vendredi ou au plus tard lundi devant le juge pour savoir s’il fera ou non l’objet de poursuites.
RFI