Le service de sécurité d’Ukraine (SBU) a revendiqué ce mardi 3 juin une nouvelle attaque contre le pont de Crimée, qui relie la péninsule annexée par Moscou au territoire russe, et a déjà été visé à deux reprises par Kiev depuis l’invasion de 2022.
« Des agents du SBU ont miné les piliers de cette installation illégale. Et aujourd’hui, sans faire de victime civile, le premier engin explosif a été activé à 4h44 (1h44 TU) du matin ! », s’est félicité le SBU dans un communiqué. Le service de sécurité ukrainien a assuré avoir infligé des « dégâts sévères » avec « 1 100 kg de TNT » à « des piliers de soutien sous-marins » de la structure. Celle-ci serait, selon le SBU, dans un « état d’urgence ». Le SBU a également publié une vidéo, non authentifiée, montrant une explosion sous-marine près d’un pilier du pont.
Pour l’heure, l’ampleur réelle des destructions est toutefois incertaine. La circulation sur le pont a bien été temporairement fermée entre 6h (3h TU) du matin et 9h (6h TU) ce mardi, a indiqué sur Telegram le compte officiel du gestionnaire de l’ouvrage, sans mentionner la raison de cette suspension d’environ trois heures.
Atteindre le pont de Crimée, un symbole puissant en Ukraine
Inauguré en 2018, le pont de Crimée, aussi appelé pont du Détroit de Kertch, est un grand ouvrage de 19 kilomètres de long. Pour le Kremlin, c’est l’un des symboles de l’annexion de la péninsule ukrainienne en 2014. Et pour l’ Ukraine, c’est une cible très particulière, eu égard à cette annexion et à l’invasion russe commencée en février 2022.
Ce pont avait déjà été endommagé en octobre 2022 par un camion piégé et en juillet 2023 par des drones navals. Depuis, la Russie a fortement renforcé la surveillance de cet ouvrage clé, qui permet notamment d’envoyer des troupes et du matériel militaire en Crimée annexée.
Ulrich Bounat, chercheur associé à Eurocreativ et spécialiste de l’Europe centrale et orientale, loue la « portée symbolique extrêmement forte » de l’attaque menée par l’Ukraine ce 3 juin. « On se rappelle que Vladimir Poutine avait conduit un camion sur ce pont », glisse-t-il à Murielle Paradon, du service International de RFI.
« Des forces spéciales agissent directement ou indirectement en plein cœur du territoire russe, sur des endroits extrêmement stratégiques. Cela affaiblit quand même la projection de puissance de la Russie. Et, d’un point de vue technologique, ces opérations montrent que les Ukrainiens arrivent encore à maintenir une capacité à surprendre l’adversaire », poursuit Ulrich Bounat. Toutefois, bien que des actions comme celle sur le pont de Crimée soient « très audacieuses », elles restent « de l’ordre du symbole ». « Elles ne bouleversent pas l’équilibre des forces », souligne-t-il.
Moscou accuse Kiev d’avoir tué des civils en ciblant des voies ferroviaires
Si la Russie ne s’est pas ouvertement exprimée sur l’attaque menée contre le pont de Kertch, elle a tout de même accusé l’Ukraine d’être à l’origine d’explosions sur son territoire, durant le week-end, qui auraient provoqué l’effondrement de deux ponts et des accidents de trains qui auraient fait sept morts et plus d’une centaine de blessés, dont des enfants.
Ces explosions se sont produites dans la nuit du samedi 31 mai au dimanche 1er juin dans les régions russes de Koursk et de Briansk, frontalières de l’Ukraine. Elles ont provoqué le déraillement d’un train de passagers, d’un train de marchandises et d’un train de contrôle, faisant sept morts et 113 blessés, dont des enfants, selon les enquêteurs.
« Il est évident que les terroristes, agissant sur ordre du régime de Kiev, ont tout planifié avec une précision maximale afin que leurs explosions touchent des centaines de civils », a indiqué le Comité d’enquête russe, chargé des principales investigations criminelles, dans un communiqué. L’Ukraine n’a pas réagi à ces accusations dans l’immédiat.
Durant le week-end, l’Ukraine a mené une attaque de grande ampleur qui a touché plusieurs avions russes dans leurs bases. Alors que les discussions entre les deux pays dans le but d’arriver à un cessez-le-feu piétinent, les offensives ne faiblissent pas.