Les autorités burkinabè réclament des explications sur la mort de l’influenceur Alino Faso

Afrique

« Mépris pour la famille de l’influenceur et pour le peuple burkinabè. » C’est en ces termes qu’ont réagi, ce lundi soir 28 juillet, les autorités du Burkina Faso, à la suite du décès de l’influenceur burkinabè Alino Faso durant sa détention à Abidjan, en Côte d’Ivoire. Alain Traoré, de son vrai nom, était détenu depuis janvier dernier et poursuivi par la justice ivoirienne pour « intelligence avec des agents d’un État étranger » et « complot ». La mort du jeune homme a été annoncée dimanche dans un communiqué par le Procureur de la République ivoirien qui précise qu’Alino faso s’est suicidé. Une enquête est en cours et les autorités burkinabè réclament des explications.

« Nous exigeons que toute la lumière soit faite sur ce drame », indique dans un communiqué le ministre burkinabè des Affaires étrangères. Karamoko Jean-Marie Traoré a également convoqué, ce lundi 28 juillet, la chargée d’Affaires de l’ambassade de Côte d’Ivoire à Ouagadougou pour, dans un premier temps, avoir de vives voix confirmation du décès d’Alino Faso.

La mort de l’influenceur est une « triste nouvelle », a indiqué le ministre. Il a prévisé avoir transmis « son indignation et sa désapprobation d’une procédure qui ne respecte pas les principes et les valeurs diplomatiques. » Le ministre burkinabè a aussi fustigé le délai – près de trois jours entre le décès et son annonce officielle par les autorités ivoiriennes – et la méthode qui s’est faite via un communiqué jugé « lapidaire ». « Il y a beaucoup de mépris, un manque d’égard et de courtoisie pour les autorités et le peuple burkinabè », indique Karamoko Jean-Marie Traoré avant d’ajouter que « cela l’est encore plus pour la famille du défunt qui découvre une nouvelle aussi douloureuse sur les réseaux sociaux. »

Les autorités militaires exigent une enquête sur ce drame et que le corps d’Alino Faso soit rapatrié au Burkina. Elles émettent également des doutes : « Le gouvernement s’interroge sur les motivations réelles de sa détention dans une caserne de gendarmerie plus de six mois après son interpellation et rejette avec force et vigueur la thèse du suicide actuellement avancée par les autorités ivoiriennes », a déclaré le ministre de la Communication. Et d’ajouter : « Le gouvernement condamne fermement cette disparition assimilable à un assassinat crapuleux. Il s’indigne de cette tentative manifeste de tronquer les faits ».

Des éclaircissements espérés en Côte d’Ivoire

À Abidjan, des réponses sont attendues, souligne notre correspondantBenoît Almeras. La mort d’Alino Faso suscite des questions. L’homme tenait une rôtisserie – aujourd’hui fermée – dans la commune de Marcory. Les voisins se disent choqués : « Il était vraiment quelqu’un de serviable et ouvert, c’était vraiment quelqu’un de généreux… dire qu’il s’est suicidé, franchement, c’est fort. »

Ils espèrent voir l’enquête aboutir : « On pense que la lumière sera faite et que cela soit vraiment réalisable mais la seule chose que je sais, c’est qu’aller jusqu’à se suicider, personnellement, cela me paraît un peu difficile. »

Les doutes persistent aussi autour des conditions de détention d’Alino Faso à l’école de gendarmerie, six mois après son arrestation. Selon l’avocat en charge du dossier, la famille n’a pas été directement informée autrement que par le communiqué publié trois jours après le décès du cyberactiviste.

Moumouni Sawadogo est l’un des délégués élus des Burkinabè de Côte d’Ivoire. Il espère des explications : « Nous avons appris ce décès avec amertume. D’une manière officielle, nous n’avons pas encore reçu d’informations, donc on attend.  On va faire notre deuil. Quand tu perds un parent, tu dois savoir de quoi il a été disparu. »

Au sein de la diaspora, beaucoup redoutent les conséquences politiques du décès d’Alino Faso car les relations entre les deux pays sont déjà glaciales.