Des « responsables » locaux s’entêtent à faire avaler la couleuvre à la population; une réunion a eu lieu vendredi dernier
Depuis environ deux semaines, le village de Gbéhonmè dans l’arrondissement de Djèrègbé, Commune de Sèmè Podji, est plongé dans une vive tension. Et pour cause : un projet de carrière de sable qu’ un opérateur économique entend implanter dans les bas-fonds du village avec la bénédiction présumée de certains élus locaux. Et ce, malgré l’opposition unanime de la population.
Les bas-fonds de Gbéhonmè, un village de l’arrondissement de Djèrègbé dans la commune de Sèmè Kpodji sont aujourd’hui l’unique espace de survie pour les habitants. Après le lotissement des terres fermes, près de 70% des surfaces agricoles sont désormais occupées par des constructions. Ceci a contraint les autochtones titulaires de droits coutumiers sur les bas-fonds à se replier sur ces zones humides fertiles. Ces titulaires de droits coutumiers représentent plus du deux tiers de la population.
Ils y cultivent la canne à sucre, la tomate, des légumes variés, le maïs, la banane, le manioc etc. Ces bas-fonds constituent la principale source de revenus des hommes et des femmes qui y cherchent des feuilles d’akassa et vendent pour leur subsistance. Depuis quelques semaines, un projet de carrière de sable qu’ un opérateur économique entend implanter dans les bas-fonds du village avec la bénédiction présumée de certains élus locaux perturbent la quiétude des populations.
Selon nos informations, après le refus catégorique et persistante de la population, une réunion a été organisée à la place publique dudit village le vendredi 15 août 2025 de 10 h à 15 heures.
Présence de quelques dirigeants et responsables qui défendent le projet
A cette séance du vendredi, il est noté la présence de quelques dirigeants et responsables qui défendent le projet. Ils étaient présents pour convaincre la population. Entre autres, M. Denis DJOGUE, Chef d’Arrondissement de Djèrègbé, M. Sévérin DOSSOU, Chef village de Gbéhonmè, M. Simon ADANDE, Conseiller local. A cette rencontre, ils étaient accompagnés de trois représentants de l’opérateur économique en question ( S. F.). La population a noté l’absence remarquable de M. DODOU Guy Jean (Conseiller local). Lors des précédentes rencontres, il avait défendu la mise en place de la carrière.
A en croire les propos des « responsables » locaux présents à la réunion de ce vendredi, S. F., l’opérateur économique ( dont le nom a été cité aux précédentes réunions), aurait déjà reçu une autorisation des autorités compétentes pour commencer l’extraction de sable sur le site. Mais, c’est sans compter avec la détermination de la population qui insiste et persiste qu’elle n’en accordera aucune importance puisqu’elle n’a jamais été consultée.
Un fait étonnant, au début de la rencontre de ce vendredi, des élus locaux ont formellement interdit à la population de prendre des photos voire des vidéos. La population s’interroge. Que se reprochent ces responsables locaux?
La population appelle aussi à travers des pancartes le chef de l’Etat au secours. « Président Patrice TALON, au secours !!! », peut -on lire.
Toutefois, plusieurs posters présentant des images des différentes activités menées dans ces bas-fonds ont été affichés par la population avec des messages clairs de désaccord et de dénonciation. On dénombre une trentaine de pancartes entre les mains de la population avec plusieurs messages. Entre autres : « Ils veulent détruire notre source principale de revenus », « Protégeons nos bas-fonds, source de vie à Gbéhonmè », « La terre de Gbéhonmè nous nourrit plus que le sable », « Respectez la loi, respectez nos droits », « Développement, oui mais la destruction et la famine à votre profit, non », « Nos bas-fonds sont notre héritage », « Quand la nature meurt, nous mourons aussi », « Un avenir vert vaut plus que l’or du sable », « Sans maraichage, cannes à sucre, tomates, feuilles d’akassa, la disette et la faim nous tueront ».
La population appelle aussi à travers des pancartes le chef de l’Etat au secours. « Président Patrice TALON, au secours !!! », peut -on lire.
La population dénonce
Par ailleurs, es slogans en langue nationale Goun et Tôri étaient prononcés pour exprimer le refus de la population : « Nous vous avons confié ce village pour le développer et non pour le transformer en un désert », « Vous n’avez rien créé qui nous rapporte de l’argent mais vous voulez détruire par orgueil et mépris le peu que nous avons ».
« Si on nous enlève les bas-fonds, c’est la famine assurée. Regardez le grand trou que cette carrière a laissé actuellement à Tohouè, un arrondissement voisin. C’est désormais une zone inexploitable et inondée. Qu’allons-nous manger avec nos enfants ? Comment assurer leur éducation. L’avenir de ce village nous inquiète », témoigne une femme rencontrée sur place, les yeux pleine de larmes.
A en croire la population, l’opérateur économique aurait été contacté par des élus et serait même déjà venu prélever des échantillons de sol dans les bas-fonds. La population fait savoir qu’à sa connaissance, aucun document officiel qui autorise l’opérateur économique ne lui a été présenté.
De plus, les titulaires de droits coutumiers sur les bas-fonds concernés affirment qu’ils n’ont jamais donné leur accord, ni pour vendre, ni pour céder gratuitement leurs terres.
« Pendant combien de temps allons-nous bénéficier de l’argent de carrière de sable ? Juste moins de 5 ans !!! Après la fin de la carrière, il n’y aura que faim et mort. Nous ne voulons ni céder gratuitement ni vendre nos bas-fonds. Nous en vivons et nos enfants les développeront », dénonce un titulaire de droit commun. . « Nos chefs sont en train de mobiliser quelques villageois non titulaires de droits coutumiers afin d’avoir de soutien mais ils devront nous tuer, nos femmes et nos enfants avant d’installer cette carrière » a martelé avec mécontentement un titulaire de droits coutumiers.
La population en appelle aux autorités compétentes et au président Talon
Pendant que la tension montait du côté de la population contre ces défenseurs du projet, des agents de la Police Républicaine ont été sollicités certainement par des élus pour contrôler la tension.
Selon les informations, à la fin de la réunion, ce vendredi, le Chef d’Arrondissement et le Chef village ont invité chaque participant à écrire son nom et signer pour constituer une liste de présence. La population est restée prudente et a rejeté toute signature pouvant être utilisée contre elle plus tard. La même population en appelle à l’Agence Béninoise pour l’Environnement ainsi qu’aux autorités compétentes, au Préfet et au gouvernement et à son chef, son excellence Patrice Talon. La population demande la suspension immédiate du projet, qu’elle qualifie de destructeur et illégal. Pour l’heure, la tension reste vive dans le village de Gbéhonmè où les habitants disent craindre pour leur avenir, leurs terres et leurs moyens de subsistance.
S.E.