Asie pacifique : Le Dalaï Lama fête ses 90 ans et donne des précisions sur son successeur

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Le Dalaï Lama a confirmé mercredi 2 juillet que ce sont bien les religieux en exil en Inde qui désigneront son successeur. Un message rassurant, envoyé en plein milieu des célébrations des 90 ans de cette figure de la résistance contre l’occupation chinoise.

« Je réitère ici que le bureau du Dalaï Lama est le seul habilité à reconnaître la future réincarnation ; personne d’autre n’a le pouvoir d’interférer dans cette affaire ». Sa voix est faible, la lecture est lente, mais le propos est clair et ferme. Tenzin Gyatso, le Dalaï Lama, fête ses 90 ans ce 6 juillet, et rappelle que le combat pour l’indépendance religieuse des Tibétains ne s’éteindra pas après son décès.

Un Dalaï Lama en exil, une situation inédite

L’affirmation est importante, car le moment est précaire : c’est la première fois depuis le début de cette institution religieuse, il y a cinq siècles, que son chef finit sa vie en exil. Or, la Chineest aux aguets de tout signe de faiblesse : elle veut prendre le contrôle de cette religion, afin de tuer sa spécificité culturelle et faire du Tibet une région complétement chinoise. Le portrait du Dalaï Lama est déjà interdit au Tibet, et Pékin fait tout pour que cette figure militante de l’autonomie de la région occupée depuis 1950 disparaisse de la mémoire de la population.

Pour empêcher l’émergence de toute nouvelle figure, les autorités chinoises n’ont pas hésité, il y a 30 ans, à enlever un enfant tibétain âgé de six ans : il venait d’être désigné comme le Panchen Lama, deuxième plus haute figure de cet ordre bouddhiste. La Chine a alors désigné une autre personne à sa place et l’enfant n’a jamais été revu depuis.

Beaucoup craignent que Pékin renouvelle cette manigance, et profite du décès du Dalaï Lama pour imposer un chef fantoche à ses ordres, surtout que cette succession peut être longue. « Si c’est un enfant qui est désigné pour lui succéder, il faudra assurer une régence, explique Katia Buffetrille, ethnologue spécialiste du Tibet. Il y aura donc une vacance du pouvoir religieux d’environ quinze ans – ce serait la période de tous les dangers ».

Un successeur dans « le monde libre » 

D’autres problèmes peuvent se poser, en fonction d’où se trouve le nouveau Dalaï Lama. Pékin, qui considère le chef religieux actuel comme un rebelle et un séparatiste, affirme que son successeur doit être « approuvé par le gouvernement central », ce qui est exclu par le clergé actuel. Tenzin Gyatso a écrit, dans un livre paru en février dernier, que son successeur se trouvera dans « le monde libre », soit en dehors du Tibet occupé et de la Chine.

Le problème est que les Tibétains en exil sont généralement des réfugiés apatrides, qui peuvent avoir du mal à rejoindre le siège du clergé tibétain à Dharamsala, au nord de l’Inde. « Si c’est un Népalais qui est choisi, conclut Katia Buffetrille, le gouvernement indien devra accepter de le faire entrer en Inde, ce qui sera considéré par la Chine comme un soutien ».  La pression géopolitique de Pékin sera donc intense pour empêcher cette transition.