Le chef de l’État camerounais sera-t-il candidat à la présidentielle d’octobre ? « C’est du 50/50 », a déclaré lundi sur RFI le porte-parole du gouvernement camerounais, le ministre René-Emmanuel Sadi. « Il n’y a aucun doute », le président Paul Biya sera candidat en octobre, affirme de son côté, toujours sur RFI, le porte-parole du parti au pouvoir RDPC, Jacques Fame Ndongo. Visiblement, il y a donc une divergence entre le gouvernement et le parti au pouvoir sur l’avenir politique du président camerounais. Jacques Fame Ndongo, qui est aussi ministre d’Etat et ministre de l’Enseignement supérieur, répond à Christophe Boisbouvier sur RFI.
RFI : Nous sommes à trois mois de la présidentielle et, à la différence des autres grands partis politiques, le RDPC au pouvoir n’a toujours pas désigné son candidat. Est-ce qu’aujourd’hui vous pouvez nous en dire plus ?
Jacques Fame Ndongo : Le candidat du RDPC est désigné. Article 27, alinéa trois, des statuts du parti. Que dit cet article ? Le président national du RDPC est le candidat du parti à l’élection présidentielle. Il est le candidat et je le dis de manière catégorique.
Mais formellement, comment le RDPC peut-il prendre une telle décision ? Est-ce lors d’un congrès ? Est-ce lors d’un comité central ? Est-ce lors d’un bureau politique ?
On n’a pas besoin d’un congrès. On n’a pas besoin d’autres choses. Nous avons nos statuts. C’est le droit positif. C’est-à-dire, l’article 27 des statuts du parti ne laisse planer aucun doute. Le président national du RDPC est le candidat du RDPC, de ce parti-là donc, à l’élection présidentielle.
Donc, il y a zéro chance qu’il y ait un autre candidat du RDPC à la présidentielle d’octobre ?
Nos statuts sont clairs. Pour être candidat du RDPC à l’élection présidentielle, il faut être président national de ce parti. Or, je ne sais pas qu’il y ait un autre président national du RDPC. Donc, c’est le président national du parti, Son Excellence Paul Biya, qui est le candidat. C’est dans les statuts du parti.
Mais le chef de l’État a fait savoir ces derniers temps qu’il répondrait en temps voulu à l’appel du parti qui lui demande d’être candidat. Il n’a pas encore formellement répondu à cet appel…
Je vous dis qu’il est candidat.
Mais qu’est-ce qui vous permet de savoir qu’il est candidat alors qu’il ne s’est pas exprimé lui-même ?
Parce que, ayant critiqué toutes les sources, je peux vous affirmer de manière péremptoire qu’il est le candidat du RDPC à l’élection présidentielle. Tout le reste n’est que supputation.
C’est-à-dire que vous l’avez vu récemment ?
Je ne peux pas répondre à cette question, mais je vous dis que j’ai procédé à toutes les vérifications possibles et réelles. L’information que je vous livre est puisée à très bonne source.
Ce que tout le monde a envie de vous demander, c’est : est-ce que vous avez pu rencontrer ces dernières heures le président Paul Biya et est-ce qu’à l’issue de cette rencontre il vous a donné son accord pour que vous nous disiez ceci aujourd’hui ?
Je ne le dirai pas, mais sachez qu’en 52 ans de haute administration, il m’est difficile de me jeter comme ça dans un tonneau des Danaïdes si je n’ai pas la certitude de ce que j’affirme. Je ne suis pas né de la dernière pluie, comme vous le savez bien.
Donc, vous avez puisé à la meilleure source ?
J’ai puisé à bonne source, c’est bien vérifié, c’est bien recoupé. Pas de doute là-dessus.
Alors, formellement, par quel canal le chef de l’État va-t-il annoncer qu’il répond oui à l’appel des militants de son parti ?
Oui, il le fera. Vous savez qu’il est maître du temps présidentiel. Il le fera par le canal qu’il jugera le plus opportun.
Alors, ce lundi 7 juillet, sur RFI, le ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement, René-Emmanuel Sadi, a affirmé que rien n’était décidé concernant la candidature ou non du président Biya à la présidentielle d’octobre. « C’est du 50/50 », a-t-il précisé…
Oui là, c’est l’État. Moi, je parle au nom du parti.
Vous êtes bien d’accord que ce sont quand même deux points de vue divergents ?
C’est vous qui le dites.
Et est-ce que cette divergence, ça ne crée pas une situation de cacophonie au sommet de l’État camerounais ?
Il n’y a aucune cacophonie. L’un parle pour le gouvernement de la République et l’autre pour le parti au pouvoir. Il n’y a pas de parti État.
Alors par ailleurs, vous êtes ministre de l’Enseignement supérieur, vous êtes donc un collègue de René-Emmanuel Sadi. Est-ce que vos propos ne risquent pas d’être perçus comme une sérieuse entorse au principe de solidarité gouvernementale ?
Je parle au nom du parti, pas au nom du gouvernement. Le ministre Sadi, qui est un frère, un ami, parle au nom de l’État, au nom du gouvernement.
C’est la première fois tout de même que l’on voit une divergence sérieuse de point de vue entre le parti au pouvoir et le gouvernement sur la question d’une candidature à venir du président Biya, est-ce que cela ne dénote pas un certain essoufflement, une certaine fragilité au sommet de l’État camerounais ?
C’est vous qui parlez de divergence. Je ne critique personne. La solidarité gouvernementale existe bel et bien, mais moi, je m’exprime au nom du parti au pouvoir.
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